La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

jeudi 21 mars 2019

Répétez-le et laissez-moi en paix :
"ici se consuma une passion, partie au fil de l'eau et de la vie ".



Aime la vie même si elle doit finir demain
S.L.

l'humilité se vit pieds nus, la tête dans les étoiles.
Moïse Cl.



L'étrange beauté du réel se trouve où vous êtes.

Élèves des Beaux arts, au début des années 60,  pour certains comme moi, rebelles et jeune sauvageons perdus dans les paradis artificiels, enfants de la beat  generation,  nous apprenions la discipline. Elle se nommait dessin, anatomie, peinture, gravure, sculpture, histoire de l'art, décoration, philosophie, lecture, et personne n'en souffrait plus que cela.

Après vint le temps de l'oubli, de la jachère, du doute, du vide, indispensables à toute autonomie dans la création.

C'est la discipline bête et disciplinée, ahané par des chefs abâtardir par les règlements, les normes et autres  originalités sociales, que je m’appliquais pendant toute ma vie, à combattre, à fuir comme la peste.
L' assujettissement à qui que ce soit me parut être moins utile que la pire des mauvaises herbes sur un trottoir de ville. Au moins, elle, poussait un cri de révolte contre le béton, la lourdeur, une  faisait  naitre en moi,  lueur d'espoir. Une vie libre dans le caniveau, valait  dix fois mieux que tout concepteur de dogme ou règlement inutile.Je vis mes frères s'éloigner  à jamais et devenir un étranger à leurs  yeux d'hommes d'affaire.

On peut parler d’amour avec une poignée de coquelicots et quatre bois flottés, posés au bord d 'une rivière , pour peu que ce land art soit traversé, par un élan du cœur et par la divine lumière descendant de la canopée.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo :création land art de Roger Dautais
"ici se consuma une passion, partie au fil de l'eau et de la vie ".

mercredi 20 mars 2019

à Morgane, fille de la mer.
À la marcheuse céleste
aux pieds nus et divins.


Aime la vie , même si...




Son absence physique me pesait. Ces derniers jours, elle prenait de la distance, ce que je pouvais encore comprendre, en tenant compte de son besoin de vivre seule.. Mais entre distance et effacement,, la mort s’était installée sournoise, collante, dévoratrice. Elle annonçait le brasier, les cendres, la dispersion dans le jusant.
Le jour de sa disparition finale, je me suis laissé pousser la barbe , en signe de deuil.
Des années de vie commune à pratiquer le land art, de courses folles dans les champs déserts, des siestes au soleil, des baignades dans les torrents, des jeux dans les vagues de l’océan, sans arrêt, de peur de se perdre, de se désunir dans l’inaction.
Je n’avais pas su comprendre, pas su entendre les intersignes des oiseaux annonceurs. Pas compris l’arrivée du dernier train en gare, celui qui se chargeait des morts comme du temps de Pitchipoï. J’étais aveuglé par le bonheur de partager sa vie.
Elle était tendre,fidèle, douce, soyeuse, chaude et lisse de peau de son ventre rose tacheté de noir.
Elle aimait m’observer en silence, me regarder pendant de longs moments. Elle aimait se taire, aussi et m’imposer ses silences ;. Je lui avait appris à aimer la musique de Sati, les rues serrées de Honfleur sous la pluie, son port à peintres du Dimanche où elle faisait des rencontres. Elle adorait la rue froide de Caen où je la lâchais pour qu’elle aille humer les portes cochères, à son rythme.
Elle recherchait le quartier de la gare,ses squats immenses dans les friches industrielles. Elle aimait se faire caresse par mes amis Junkies, chez qui je me dépannais , les soirs de galère, pour terminer la nuit en beauté.
Elle aimait mes nuits d’ivresse,autour du port, celles qui duraient jusqu’à la fermeture des bars à poivrots.Elle aimait aussi le quartier du Vaugueux où je retrouvais Suzanna, ma petite juive, toujours à sa table de labeur, avançant ses illustrations à rendre «  des demain ». Elle aimait son appartement exigu, la gamelle d’eau fraîche sous la table et son Jack Russell, ébouriffé comme sa maîtresse, qui la courtisait tout le temps.
La mienne, c’était une trois couleurs Bats. Elle avait des oreilles et une queue de renarde et le caractère rebelle et tendre qui allait avec. Mais, elle ne se laissait pas prendre comme ça. Elle avait le coup de croc, facile.Ces deux là pourtant, étaient inséparables comme Suzanna et moi.
Onze années de vie commune, menées à fond, avec moi comme exemple, de la graine d’ortie. Puis, une mort subite. Un infarctus,probablement... dans mes bras.
Ce que je l’ai pleurée !

Plutôt que de reprendre les petits rituels de deuil, sans enthousiasme , j’avais voulu inventer un truc, dans un endroit qu’elle avait bien aimé.
C’est ainsi que je me suis retrouvé dans une carrière abandonnée de Fontaine-Henry, à lui élever un premier autel, afin que son âme puisse rejoindre la Grand Prairie.
Tout passait par l’intention et le geste, la cueillette végétale, la mousse, la plume, la pierre, le bois sec pour le bûcher, le feu, le vide..
j’ai allumé le bois sec en chantant et j’ai vu son âme bleue, s’élever en fumer, rejoindre le ciel
parmi les petits rapaces.
Tout parlait de Morgane, chienne heureuse, ici, jusqu’à ma prière adressée aux faucons crécerelle, pour qu’ils l’accueillent dans la grande famille des oiseaux libres.
Elle devenait, oiseau.
Je suis resté sur terre pour raconter son histoire, avant de partir moi-même en fumée
Roger Dautais
" Parce que je suis rien qu'une  poignée de cendres grises"...
Mémoires d’un Hobo céleste.

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo : création land art de Roger Dautais
" à Morgane, fille de la mer".
Grande plage de Ouisterham - Normandie

mardi 19 mars 2019

Cairn de la cabane du silence : pour Maria, seulement



Pour Erin, seulement,
car elle comprendra cette histoire écrite pour elle.




Il fait toujours trop beau après les catastrophes

Depuis la dernière tempête, ils avaient fermé la seule voie ferrée capable de desservir, les coins les plus reculés du pays, où je trouvais matière à land art. A pied, en longeant la voie ferré, c'était quand même, dix kilomètres et sur la ballast, ça devenait vite un enfer. En empruntant quelques chemins de traverse, ça se faisait.
J'avais toujours aimé Woodie Guthrie sa voix nasillarde, ses histoires de trains,de hobos et des marées prises en rade, qu'il trimballait sans son sac à dos.
Voilà pourquoi, je suivais les rails.Je m'appuyais donc cette distance, rencontrant sur le parcours, des morceaux de ciel bleu, tombés dans des flaques d'eau.
Il fait toujours trop beau après les catastrophes, mais on arrive par ne plus y croire. C'est la même chose avec les histoires d'amour.
J'avais réussi à rejoindre la Cabane des Silences, non loin de la tombe de l'ange.
J'avais retrouvé la cafetière posée sur la cuisinière à bois et le tablier jaune de mon amie, pendu à une patère.
Elle s'appelait Maria.
Maria aimait bien, cette cabane abandonné, eu peu en ruines, il faut le dire. Elle lui ressemblait, trainant quelques addictions qui lui rongeaient le cerveau.
Elle aimait aussi battre le bitume avec son chien errant qu'elle appelait " mon bâtard d'amour ".
Marie "faisait "la tournée des bars de nuit, jusqu'à plus soif et c'est là que je l'avais trouvée, en fin de courses, avant de finir dans son lit.
Nous avions fini par nous entendre, même si je laissais les portes de placard ouvertes, dans sa cuisine et mes chaussures trainer dans sa maison.
Un jour, je l'avais emmené au bord de l'eau et appris qu'un cairn n'était pas qu'un tas de cailloux, comme disaient les ploucs du coin.
Non pas, un objet quelconque, de forme bizarre et de destruction du paysage, mais bien un trait d'union entre elle et moi, entre nous et le ciel. Ça lui plaisait bien à Marie. Elle disait que c'était comme mon sexe, un trait-d'union entre elle et moi.
ça me plaisait aussi d'élever des sexes en Ria.
Des filles comme Maria, ça ne sait pas vivre longtemps. Trop à fond dans le carburant. Son cœur avait cédé.
J'étais le seul au crématorium. Tu sais les hommes, c'est souvent comme ça, ils profitent de la bonne occase, remettent leur froc et s'en vont.
J'ai récupéré son urne et je suis allé répandre ces cendres,au jusant, du côté du Bono, où les eaux du Sal, rejoignent la mer.
A chaque marée, je la vois passer, Marie, en compagnie des Bernaches et je chante pour elle.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Cairn de la cabane du silence : pour Maria, seulement

Bretagne sud -2014

lundi 18 mars 2019

Rupture  :  pour Sarah



Pour Sarah
Si comme moi, tu ne connais pas l'éternité,
rien ne t'empêche d'en inventer une autre.
Roger Dautais


Aux femmes-étoiles qui nagent entre deux eaux...

Nuit blanche...
Cette nuit, je suis passé de l'autre côté du miroir. Je savais t'y trouver, mon amie. Tu dors de trop. Ta pensée se sclérose et se retrouve dans cette pensée universelle morte en ce moment. Tu te veux normale, normalement normale, désaccouplée, libre. Ce sont des mots. Il faudrait les redéfinir, les élargir, les enrichir. Redeviens vague dans ta fumée d'herbes et satisfais-toi de cette véritable existence excessive. La mer s'était retirée quand tu avais regagné le bord, les cheveux  mouillés. Je connaissais ta façon de les balancer sur le côté de la tête,  pour le essuyer vigoureusement, avec ta serviette épouse, en regardant la mer, avant de la nouer "en fakir", ce qui  grandissait aussitôt ta petite taille.
Elle est encore froide-   m'avais-tu dit, couverte de frissons. 
La plage des commensaux était sujette aux vents du nord. . Parfaite pour des cairns, pas pour se baigner.
 Je te regardais, en perpétuelle oscillation par rapport à la norme et son désir d'ordre. Je supportais mal ce flou dans lequel pourtant, je trouvais de quoi t'aimer. Probablement,  m'échappais-tu, en permanence, sans le savoir. 
Ton bateau-couple avait coulé dans la violence, malgré tes enfants, et personne ne montrait à bord, maintenant. Quelque marin ou capitaine, pour lofer au bon moment, mais rien, rien d'autre que le vent n'embarquerait avec toi, trop rebelle, trop abîmée par la vie.

Sarah le savait. Elle en jouait. Je l'avais accepté trop longtemps. Je devais partir, aussi.

-Ton cœur te lâche, fais toi soigner -,  avait-elle  lâché, en me regardant dans les yeux, ses deux mains   mouillées,  posées sur me bras.
Tout était dit. Je suis parti le jour même. J'ai quitté sa maison, sac au dos.
 
J'ai traversé les dunes d'oyats, qui remontait vers le nord. J'ai emprunté le pont de pierre qui franchissait le fossé des premiers gabions. Son étoile se reflétait dans l'eau bleu, pendule sacré sur fond de ciel bleu , tombé sous l'arche. Je pensais à Sarah que je ne reverrai plus jamais, absorbée par sa folie naissante.
J'ai pleuré longtemps cet après-midi là et je me suis perdu dans la nature.
Roger Dautais
Notes de Land art pour la route 77

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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" Rupture " pour Sarah
Cote de Nacre - 1998
 
Cairn du souvenir  :  pour Tio + *



à Christian Cottard
frère d'écriture.


Durant ces dernières semaines, une longue indifférence m'avait entourée sournoisement, depuis que mon opération du cœur s'était annoncée. Rien de violent. Non, les mots changeaient de trottoir, les regards fuyaient. Même les chiens détalaient en courant devant moi.
Je suivais Tio et Zac sur le même trottoir. De vieux amis que je n'aurai dérangé pour rien à cet instant. Je me suis dit au même moment : : tiens, je suis vieux, je commence à sentir.
Beaucoup craignent cette maladie sociale. Et pourtant, à moins de se faire écraser, ou de mourir brusquement terrassé par un infarctus, vers 30 ans, leur vie future les amènerait un jour à la vieillesse. Et justement, ce pays là, habité par des séniles leur faisait peur.
Alors, je suis parti pour de bon. J'ai quitté la maison. Comme j'étais voyageur, je me suis retrouvé loin de chez moi, tout à fait à l'aise.
Tio venait de fêter ses quarante six ans et elle m'avait confié quelques poème de son cru, recopiés sur des petits papiers blancs, roulés sur eux-même. Sa main de femme exquise, , les avait entourés d'un ruban rouge, pour souligner le côté cadeau fait à la nature.
J'ai pris la route qui menait à la voie ferrée. J'aimais les voies ferrées, les chemins creux, les plaines sans fin, les carrières dangereuses, les chênes et les oiseaux, surtout les sternes.La mer était mon paysage préféré. Pas de quoi rester longtemps seul,avec ces amis.
Après quelques heures de marche, j'entendis le chant de l'Océan. Il avait le pouvoir de me calmer aussitôt.
Le vent s'était levé lorsque j'étais arrivé à Ty Bihan. Je me suis mis aussitôt à l'ouvrage, élevant une série de cairns face à la mer.. J'ai réparti tous les poèmes dans ces pierres levées, puis j'ai allumé un feu de solitude.
J'étais heureux, loin de cette hypocrisie déambulant , mielleuse qui me souhaitait une bonne santé et pensait le contraire.
Les poèmes prirent la mer à chaque écroulement de cairn. Je pensais à Tio que j'aimais tant et qui, elle aussi n'en avait plus pour longtemps à vivre. Roger Dautais
Notes de Land art pour La Route 77

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Photo : création land art de Roger Dautais
" Cairn du souvenir " pour mon amie Tio + *
Bretagne Sud - 2014

* Tio est morte en 2014 dans  l'indifférence d'un monde cupide.

dimanche 17 mars 2019

Flottaison  :  pour  Edith et Maud

Aux passantes du lac...



Entre le ciel et l'eau.

Ce jour,là, à l'occasion de l'arrivée du Printemps, j'étais descendu au lac des trois moulins,avec une boîte d'allumettes. J'y avais fabrique une table à feu, dont le principe était de rehausser le foyer, afin d'y allumer un feu, dominant les eaux du lac. Dans ma vie de land artiste, le premier remontait à deux ans, en compagnie de Lee, une amie Coréenne et photographe.
Intéressée par ce spectacle, elle m'encouragea. Aujourd’hui, j'en étais arrivé à la vingtième.
Je montais un bucher en forme de tipi indien. Au bout d'une heure, le feu s'éteignait en cendres grises que je chargeais sur de petits radeaux de roseaux. Une fois poussés sur l'eau, leur fumée blanche purifiait ainsi mon espace consacré aux flottaisons. Je ne pouvais oublie tous ces feux de solitude allumés dans ma vie, auxquels j'avais confié tant de confidences.
Le premier datait de l'hiver 50.Javais déjà besoin d’échapper à ce monde violent qui régnait à la maison, par la magie du feu. Il me paraissait, immortel.
Edith et Maud, mes deux amies d'enfance, furent mes premières spectatrices.
Et jusqu'aux plus récentes femmes connues, toutes avaient été initiées, par moi, à ce jeu du feu entre le ciel et l'eau.
Toutes sauf une qui, ne voulant pas y assister sans explication, en avait été privée.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo : création land art de Roger Dautais

"Flottaison " pour Edith et Maud, mes étoile d'enfance.
Lac des trois moulins.
Normandie - 2006
Contraste :  pour Maria-Dolorès Cano







à  ma femme aimée, MarieClaude...

Je décide de remonter  vers le ciel. Je n'ai plus d'eau et la température est intenable au fond  de la carrière. Considérant que le simple est un  long  processus de simplification, ma  journée sera essentiellement de  marche, d'observation, d'écoute des petits rapaces en chasse. Je  n’élèverai qu'un cairn,  une fois la surface de la terre atteinte. 

Détrompez-vous, je ne vis pas dans le passé. C'est le passé qui vit en  moi. Nuance.

Mes silences se comptent par années. Mes réflexions, je les confie  à la mer, aux  pierres, aux animaux sauvages, avant tout.

Ce  long manteau que je  porte est  brodé de  blessures, mais je reste atentif  au chant de la mer qui guérit tout.Il  y a plus de  poésie dans  le flux et le reflux de la mer, que dans le  plus beau de  mes cairns. Voilà  pourquoi je  l'écoute longuement.

J'ai connu le désert absolu de la  longue traversée, lorsque frappe  la maladie grave. Je m’y apprête à nouveau. Le voyage sera long. Vous ne connaissez pas mes hurlements de  loup  blessé. Ils ne se  partagent pas. Dans ces cas extrêmes, nul dieu vers qui me tourner, nul besoin de fausse condescendance. Il me restera encore,  une seule solution  : survivre. Je suis résistant. J'ai survécu aux coups de mon père.
J'ai souvenance de pas tracés dans le sable du tombolo de  l'Île de Stuhan:  éphémères, rapprochés, allant vers la mer, si fragiles. Cette fragilité de  l'instant fait vibrer  mon cœur malade, toujours capable d'aimer.
Ce jour  là, deux sternes volaient  à  l'envers, devisant, les yeux  dans les yeux. Nous avions écouté leur chant sacré,  à deux pas des  menhirs de Carnac. 
Leur va et vient annonçaient le  printemps.
 Fallait-il autre chose pour  être  heureux ?

Roger Dautais  
 Notes  de  land art pour  la Route 77
LE CHEMIN DES  GRANDS JARDINS
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Cairn  : " contraste "   pour Maria Dolorès Cano, en fraternité.

samedi 16 mars 2019

Sœur de septembre  :  pour Emily de Wavrechin


Marcheuse céleste...

Les contours flous de ta mémoire amnésique, s'avalaient en une vague océane. Reste aujourd'hui ton corps noyé, un bout d'étoffe turquoise et le souvenir d'apnées sporadiques, d'après l'amour. Temps vide ancré dans ton ventre labile, où j'aimais me perdre, âme rebelle, où je frottais mes âpretés au cuir de la bête que tu étais, plus belle pourtant, mais si sauvage. Mes larmes effilochées, c'est le vent qui les volait, au passage. Tu photographiais nos pas dans le sable du tombolo. Nous allions sur l'île de Stuhan, sachant déjà que notre amour allait mourir, avant la prochaine lune.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo : création land art de Roger Dautais
" Soeur de septembre " à Emily de Wavrechin
Villers sur Mer - Calvados -Normandie - 1997


*


Remords et la vive parure de l'écorce
Un désir mémorable se souvient d'une douleur
Imprime le flux à l'épreuve de la mort

Au bout des doigts la déchirure cruelle
L'ombre de oiseaux se souvient
d'un instant éparpillé.

Guy Allix
Couronner le Sal  :  pour la marcheuse céleste



L'art est la  matérialisation de  notre besoin de sacré.
Marie-Josée


Capturer  la magie d'une rivière, explorer ses rives, de la source à la rencontre avec le grand fleuve,  m'a pris  une  grande partie de ma vie. A chaque fois,  pourtant, accompagné  ou non, je dois  mettre mon savoir de côté, tant chaque rivière est avant tout  une personne  à découvrir avec humilité.
 Roger Dautais
Notes de land art  pour la Route 77

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo  : création land art de Roger Dautais
" Couronnement du Sal "
pour la  marcheuse céleste.

Le Bono   - Morbihan  -  Bretagne

vendredi 15 mars 2019

Des terres sombres aux terres reculées du vieux monde...  pour Maïté-Alienor 




Pour Erin,
parce que, tu sais, j'ai failli te quitter pour toujours...


Désolation australes...

Des aubes stériles de tes paupières nues, jusqu'aux aurores de pleine lune, à chaque pas, Norska, enjamba pour nous, alors que nous la suivions les yeux fermés,un corps affaissé. Des terres sombres aux terres reculées du vieux monde, chaque tombe, chaque recoin de terre ayant reçu la visite de ton âme angélique, fut retournée.
Les Îles de la Tortue atteintes en canoë à peau, qui étaient apparues dans les lacs, jaillissant du permafrost, entourées de terres sacrées, avaient adopté comme dieu, une pierre longue et pointée vers le ciel, comme un lingam.
Toutes furent pénétrées, fouillées, retournées, traversées au rythme du tambour du monde.
D'est en ouest, du nord au sud et du nadir au zénith, pas le moindre espace ne résista à la transe chamanique. Le monde devient une onde unique et répétée, un mantra éternel. Pas un arpent d'aube stérile, pas un lambeau de ta peau d’albâtre, pas un chêne dolent, pas une tour épique de pierres sèches, n’échappa à notre vaillante troupe.
Tu te faisais appeler la marcheuse céleste, fille de Kérouac, mais sortie de toi-même , essence déchirée, sanguinolente, ton âme n'était qu’hémorragique.
Tu croyais tenir le monde au creux de ta main, le jade prisonnier sous les pins, te rappelait, mordant les aiguilles rousses cruellement qu'un ami, même de pierre, ne s'abandonne pas pour des raisons futiles.
Ton errance commença.
Roger Dautais.
" Le livre des jours sombres" .
pour
LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo : création land art de Roger Dautais
" Des terres sombres aux terres reculées du vieux monde".
Pour Maïté /Aliénor


*



J'ai écrit ce texte, au cœur de la nuit du 13 avril 2019, dans une chambre du service de cardiologie. Pôle vasculaire B. chambre 45.
Merci au Samu qui m'a sauvé la vie. Merci à toute l’équipe soignante, pour leur humanité.
Je suis maintenant inscrit sur une liste d'attente, afin de recevoir un triple pontage coronarien, au CHU de Pontchaillou, à Rennes. Ma vie ne tenant qu'à un fil, je vis en sursitaire.
En conséquences, mon projet LES VOYAGEURS DU PONANT est reporté d'un an. Si tout se passe bien, je devrai reprendre le land art, à la fin de l'été.
Toute ma vie n'a été qu'une histoire d'amour et de cœur.

vendredi 8 mars 2019

Exil  : aux marcheurs de  l'impossible étoile



Marchons, nos traces finiront bien par retrouver la poussière du monde, lorsque nous ne serons plus..
Roger Dautais







Mon amie,

Tu mes dis qu’en land art, je façonne le paysage et que cela t’étonne.
Le contraire est vrai aussi. Je cultive cette plasticité,cette porosité au monde de mon cerveau , qui le fait me façonner autant que je le façonne.J'aimerais arriver à cette totale disparition de sentiment de possession d'un art, aboutit en tant qu'objet. Je pratique le land art depuis 1997. Cette longue route, m'a permis des milliers de créations. Cela fait naître parfois et met en place des frontières dans l'esprit, ainsi qu'une vision kaléidoscopique du parcours que je ne souhaite pas.

. L’expression ne doit pas être bridée ni dérangée par ces pensées là. Libératrice, lorsqu'elle est bien vécue, elle aide au recul du handicap, ou tout du moins à sa stabilisation. Je l'ai mille fois constaté dans mes ateliers d'art-thérapie, en institution( EHPAD; Prisons, CHRS)

Pour mon cas personnel, puisque je te réponds alors que nous marchons ensemble, vers le même but, comprendre ce que nous sommes individuellement ou associés, , au moment de la création, qu'elle soit fugace ou qu'elle dure plus longtemps, une modification de conscience suffisamment puissante, me permet de voir en avant, d'être matière fusionnelle avec le paysage. La pensée de Carlos Castaneda ou de Mooji,continuent à m’éclairer.
Je sens physiquement, profondément cette aspiration dans le paysage, jusqu'à le devenir moi-même. L'amour de cet état là, crée le désir, engage l'action, alimente mon énergie essentielle. Je pense aussi avoir trouvé le même état d’esprit chez Peter Irnick, chaman Inuit, lors notre rencontre
en Normandie.

La méditation aide aussi à se rapprocher de cet état. Elle ne fait pas tout, car, si la pensée tourne en rond, s’arrête à elle-même, s'il n'y a pas objectivation de cette pensée, je passe à côté, perdant automatiquement le sens du sacré.. Trop répété, trop vécu, cet état est frustrant, et l’abstraction pressentie qui me porte, ne me suffit pas. Développer une bonne résistance à cette frustration, en parallèle à la volonté de continuer, est aussi un des moteurs de mon action de land artiste. Des ces voyages intérieurs et mystérieux dans l’inconscient, naît le désir.
Sans ce désir, la vie est bien fade.
Seule, l'incarnation de cette pensée, en œuvre land art me libère de cette tension. C’est aussi un chemin spirituel et de recherche constante.C'est un beau voyage, mille fois repris et difficile à partager.










Avant route chose, créateur de rêves, je revendique cette qualité là, je les vis. Je ne prétends appartenir à aucune élite artistique, ni faire de prosélytisme en cette matière, simplement à t’expliquer, mon amie, depuis quelques mois, ce que je vivais de fort, de puissant dans le land art et qui m’aide à avancer. Je ne pratique pas la dichotomie. Si je me comparais à un animal, je serais un cheval fougueux et sauvage allant vers la fin de sa vie. Ça te va ?



J'aime les plaines désertes autant que les torrents impétueux, le coquelicot autant que l'orchidée sauvage, la pluie de l’ île aux Moines comme celle de Cabo San Vincent, au Portugal. J’aime l'herbe de mon jardin, comme celle des pâturages dans les Alpes Mancelle J'aime méditer sur un rocher de Ty Bihan, face à l'océan, comme au pied de la Pyramide Keops. J’aime le chaouabti anonyme autant que celui du Père divin Hekarechou. J'aime la chaleur torride de Tafraout, dans le sud Marocain, les courses dans le désert de pierres, et la fraternité partagée avec mon guideJ’aime la grandeur du temple de Carnak, étouffante et été, et l’humilité du guide. J’aime leet le recueillement de nos âmes en vadrouille, devant les tombes de Caceres J’aime le yeux de ma femme, y lire son bonheur, lorsque nos naviguons sur le Nil, car ils deviennent le plus beau des paysages.
J'aime la fluidité du sable du désert de Douz, en Tunisie, sur les pas de Laurence d’Arabie et le grain de celui d'Etel, quand j'y trace une spirale éphémère. J’aime , la gelée blanche de Kerfontaine, les chemins creux de Kerplouz, les ruisseaux de Kergrist. J’aime les Monts d’Arrée  chant de pierres surgi des entrailles Celtes, surplombant le jade de la mer d’Iroise.
Avant toute chose, j’aime que le monde me surprenne pour m’apprendre encore à vivre .


l

Tu me demandes, amie, si le land art m'a modifié ?

Certainement et en profondeur, mais le travail n'est pas terminé. Beaucoup trop de défauts m'alourdissent encore, et le reste de ma vie, servira à préparer le grand passage que j’aimerai accomplir, léger et serein.
Traumatisé par cette opération de la colonne vertébrale réalisée le 29 septembre 2017, dont je souffre encore, handicapé dans ma vie, même si cela s'arrange, et ne se voit pas, j'ai mis ce très long temps consacré au soin, à la disposition d'une réflexion plus générale sur mon œuvre de land artiste.
Elle est belle mais ne représenterait pas grand chose, sans ce lien permanent à 'humain,qu'elle contient, sans mes combats, mes obsessions,mes engagements, mon amour de la vie.
C’est ce qui la porte, la rend humaine, accessible ou plus symbolique selon le degré de lecture. C’est ce qui doit être ma ligne de conduite. L'humain avant l’œuvre.
Plus porté à donner à celui qui a peu reçu de la vie, qu'à celui, qui comblé, se gave de bonnes choses et le revendique scandaleusement.
Mon land art porte ces valeurs.






Le monde courre à sa perte et je suis un de ces coureurs de fond, en qualité d'être vivant. Au moins aurais-je profité de ma lucidité pour ne pas être qu'un mouton suiveur, mais aussi, un passeur de mots, d'idées d'actes , dans ma vie d'homme. Si ce tumulte intérieur en a fait souffrir plus d'un, peut-être toi, mon amie, je le regrette, cela faisait partie du package, dès ma naissance et cela existe toujours aujourd’hui. .
Je continue ma route.
A partir du 20 Avril, elle sera maritime et sur les îles du Ponant, en France, là où les oiseaux de mer, volent à l'envers quand le vent le leur permet. Nous serons sept artistes dans cette association que j'ai imaginé et crée:

LES VOYAGEURS DU PONANT.
Sept artistes ,15 îles, près de 15000 îliens à rencontrer, sur une petite année, probablement mon dernier grand projet. ...Carpe diem
Roger Dautais

Notes de land art pour la Route 77
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mercredi 6 mars 2019

Le cri du Jade abandonné  :  pour Pastelle  ( Sophie)

La dérive des âmes sœurs, rouges.  to Erin



Liste de courses pour après-demain…

Sur le bord de tes rêves, un bonzaï s’étiole. Le réel trop prenant, une sirène qui le ronge et le met en danger, le feu est au jardin des mémoires. L’invitation est faite. Entrer dans le monde parallèle qui l’entoure, le stresse. Qui l’oblige à changer de posture, à pousser ses bras ébourgeonnés dans l’espace, ligaturés au laiton ?
Satsang de tes nuits bohème, de tes rêves perdus, rien ne t’es donné qui ne soit venu d’en haut. L’esprit se fait serpent, la langue bifide quand ‘l’aigreur paraît au jardin.

Liste des courses pour demain :
Une seule rave party underground, un jardin de mousses, une chapelle unique à la Vierge, un seul ange en ria, un seul chêne fendu sur la route, une seule cabane des silences, un seul jade enfoui, un seul bouton de rose, fané. Les parages du vide de Houellebecq.
Le « trop tard « s’est installé dans la brume, qui nous rend le réel invivable.
Je fais quoi, maintenant, de cette absence, femme muette ?

Ô salto
Au Bono, le pont suspendu grince sous les pas des fantômes et le cadenas rouille , seul,au-dessus
du Sal embrumé. La souche en déserrance quittera la ria  pour  un échouage définitif au cimetière des  bateaux, bois contre bois,  unis dans la mort.

 Je reprends la route ce  matin.

Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création Roger DAUTAIS
" Le cri du jade abandonné " Pour Sophie ( Pastelle )
" Ämes soeurs , rouges, en dérive " To Erin

Jardin public de Caen - Normandie

***



Rien n'est jamais acquis à l'homme.
Ni sa force Ni sa faiblesse ni son cœur.
 Et quand il croit Ouvrir ses bras
 son ombre est celle d'une croix
 Et quand il croit serrer son bonheur
il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce
 Il n'y a pas d'amour heureux .
Georges Brassens

 ***

Plaisir solitaire
entre mes doigts -
pinceau et encre
Choupie Moysan

Revue par Serge Tomé, 2018
" La louve et la brebis " pour les bergères.aux pieds nus.




J'aime le calme de la renarde allaitant ses petits...


Je ne suis pas fait pour la guerre...

Autre chose, j'ai vécu de toi, le départ de l' île d'où tu chassais sur mes terres, pour aller, je ne sais où, continuer vers un là-bas. Terre d 'exil, mise à nu, par tes bras de labeur, j'ai cherché sur les terre noires, traces de ta vie, ce rayon de soleil noir; enterré. J'ai creusé de mes mains, l' humus, jusqu'au ciel de jade, abandonné aux chiennes de passage.
Mais enfin, fallait-il une mise à l'eau radicale et se b noyer dans la tourmente pour en arriver là d’incompréhension à faire tourner le lait dans la maison?
J'aime le calme de la renarde allaitant ses petits, mais pas ses crocs dans ma chair.
L'ex
Les exilés défilent sur les terres noires. Je les rejoindrai à la nuit tombée, mes frères. Autour des feux de solitude, je leur raconterai l'histoire de cette brebis devenue louve, avant de quitter l'île, où je vivais de toi.
Roger DAUTAIS

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/
Photo :création land art de RogerDautais

" La louve et la brebis " aux bergères.
Plages de la Côte de Nacre - Nord de Caen - Normandie


***


Sant 'Engracia

Très calle de Sant'Engracia,
Retour dans les parages du vide
Je donnerai mon corps avide
A celle que l'amour gracia.

Au temps des premiers acacias
Un soleil froid, presque livide
Éclairait faiblement Madrid
Lorsque ma vie se dissocia.

Michel Houellebecq
Les parages du vide

mardi 5 mars 2019

 
 
 
à Maria-Dolorès Cano


Pour le moment, je demeure en moi-même à l’écoute de ma propre nature. Là, brille mon étoile.
La route sera reprise, à l'insu du jour, entre deux heures-temoin, au cœur de la nuit prochaine, sans la présence de qui que ce soit.
Le chemin de Kerléano me parait interminable. les fougères poussent trop vite cette année. Elles donneront du bois,cette année. Mais avant,aux crosses en l'air, je déserterai. ferai le mur de la cour de la caserne .A Ménimur, il manque ds pages au livres. les choufes ont sifflé trois fois. Rien à voir là-dedans.
On se résigne toujours au moment de plier les gaules. Pareil pour les pierres. Trop grosses, elle dictent leur loi. J'abandonne la grosse pierre, pas la partie. Trop lourde.
Et pour la mort,c'est pareil. Au peloton d'exécution, à la limite, un cri, un chant des partisans. Après, c'est plus ton truc.
Tu connais, la dernière ligne droite, le dernier baiser, le dernier nuage, le dernier pas, la dernière bouffée d'air, avant de quitter le merdier.

Mais alors, pourquoi le land art ? C'est le meilleur moyen de m'effacer du monde. J'y vais de ce pas.

Roger Dautais

LE CHEMINDES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com:

Photo : création land art de Roger Dautais

Pour Edith et Maud, petites étoiles au firmament de  ma mémoire.
 
 L'histoire les avait déposées  parmi nous, sauvées de je sais où. Nous étions frère et sœurs dans la même cour. Qui  peut bien me dire, encore  ici, que  nous n'avons pas de cœur. Vous n'étiez  même pas  le soupçon d'une  intention  de  naissance,dans le cerveau de vos parents. Enfants de la guerre, nous garderions en nous cette peur d'être dés-aimés. Peur de  mourir de faim, quand  nous mangions le pain sec dans la cage de lapins. Mais c'est de trop  peut-être, pour vous, gens de  haute volée  intellectuelle, qui adorez le  gourou et pratiquez  l'inverse de  son enseignement.
J'ai vu tes  pieds  nus, marcher sur le granit de la chapelle, devant la Vierge.J'ai vu tes mains allumer des ciierges Etait- ce pour denvenir ce que tu es ?
Le mépris est  un poison. L'Amour n'est pas  à trouver dans cette direction. J'ai mal pour toi, égarée, aujourd'hui.
Roger



lundi 4 mars 2019

Tipi  " Aux passsantes"



Nous ne voulons pas de richesses
nous voulons la Paix et l'Amour.
Red Cloud ( Mahpiya Luta )



Pour ta boite aux lettres.,
marcheuse aux pieds nus.

Ce n'est pas que je perde en humanité, maintenant que l'heure est venue d'approcher de l'autre âge. Non, je ne le pense pas. Mais l'on veut encore m'apprendre à vivre, alors qu'il est grand temps de m'apprendre à mourir. Maîtresse la nuit, oui, mais pas le jour. Lâche moi. Je refuse les leçons particulières, comme enfant, l'école. Je franchis les portes, en homme libre. Alors, je deviens à vos yeux, jour après jour, plus vieux, moins facile à comprendre, à vivre.
Je me délite. L’entropie me grignote. L'insignifiance me guette. Bientôt, la transparence. L'effacement n'est plus une question de style, de contrainte littéraire, lorsque le corps se dérobe.
Je connais mes semblables, les courbés, les fatigués, les souffrants, les encombrants. Il deviennent petit à petit, des invisibles, de ceux qui ne rentrent plus dans les comptes. Il se fait que je le sais, je les rejoins.
Roger Dautais
Bruits de couloir.

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo : création land art de Roger Dautais
" Tipi " aux passantes.
Biéville-Beuville

...Je ne revendique plus grand chose, si ce n'est le droit d'être libre de pratiquer le land art. Émettre des vœux , à mon égard, ne te sert à rien si t'appliques en suite à les détruire. La violence ne te vas pas.
J'ai encore de beaux projets en tête.
R.D.
Hommage  à Janis Joplin

Aux oiseaux des îles, le vent...
au monde,  mes cairns,

A nous, les routes poussiéreuses, chaudes et désertes, du Sud. Sixties de mes amours défuntes, ramenez-moi, là bas, dans les tombes de Caceres. Je danserai pour vous, aux sabbats, sous la lune. Je marquerai mon passage de pierres blanches. De Faro à Cabo San Vicente, chez José , mon frère, près des agaves géantes. De Setubal à Lisbonne, Maria aux pieds nus. Morte.
Les cabanes étaient pauvres, mais les cœurs, riches.
Si l'alcool coulait à flot,si nos corps avaient basculé dans les paradis perdus, et certains, sombré jusqu'à la mort, nos esprits savaient sauver l'amour.

Il faudrait, maintenant, me ranger, mais de quoi ? Mais de qui ? Pour quelle morale ?
Je suis du monde, je suis au monde, éveillé présent, en quête de l'absolu. Tu ne me piègeras plus. Laisse -moi contempler le ciel, seul. Je n'ai plus besoin de toi. Je ne t'oublierai jamais.
Les terres de la Siera Monchique, en témoignent, j'étais l'homme d'une seule femme. Je suis étranger, Suzanne te l'a dit.
Roger Dautais
Route de nuit.

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo : création land art de Roger Dautais
" Hommage " à Janis Joplin

*

Déjame susurrar los exquisitos versos.

¡Que mis labios finalmente quieran decirte!

Corto, cincelado estas palabras elegidas.

Paros de mármol para seducirte.



Son angustiantes como un precio de terciopelo,

Son como cerdas pálidas ardiendo ...

Déjame susurrar los exquisitos versos.

¡Escrito para volverte loco!

Florbela Espanca

dimanche 3 mars 2019

Cairn du Don   :  à Pierre Dautais,  mon grand-père.


4.OO Heures, nuit noire.

à Pierre Dautais,
mon grand'Père.


Au cœur de la nuit, j'assume le quart sur mon radeau dérivant.Une pluie fine et traversante, me glace le corps. Le vent est établi pour un moment.
J'ai quitté le continent, hier, pour aller sur l'île aux Moines, retrouver mon Grand'père. Il n'a plus d'âge.
12 fontaines d'eau douce, en sa compagnie de revenant.
Les fontaines de Haleguen accueillent mes insomnies. Je ne dors plus bien depuis le 29 septembre 2017, jour où j'ai failli perdre la vie. Grand'père me tenait par la main, sur la table d'opération, devenant, à cet instant, un rêveur permanent.
Cette veille de nuit met à nu tous mes besoins de repos. Je suis épuisé.

Pierre est là, debout devant moi, avec sa baguette de sourcier.
- Bonjour grand'père
- Bonjour mon petit. T'as pas dormi ?
- Non, pas bien.
- T'es toujours d'accord,
me dit -il en me passant la main dans les cheveux coupés au bol.
- tu vas me regarder sans me poser de questions ?
- Oui, grand'père.
Il porte ses vêtements de paysan, son grand béret noir des gars des pêcheurs de sardine, le teint basané et des sabots neufs.
Il a une barbe piquante et une grosse moustache qui lui cache la bouche et bouge quand il parle. J'aime cet homme rustique. C'est mon grand'père paternel.
Tête nue, il me donne ma première leçon de radiesthésie.
Il est venu ici, depuis La Turballe, à cette occasion. Je remarque la finesse de ses mains.

Je n'ai rien oublié des senteurs de pins maritimes de Saint Nazaire, ni de la peur des bombes, transmise par maman, ni des morts de la famille, en guerre, ni de l'exil, ni de la pauvreté, ni de notre fierté naturelle.

Me voici, écoutant, mouillé, transi de froid, le bruit du courant de la Jument, au galop, près des fontaines Haleguen de l'Île aux Moines.
Si le soleil s'est levé, je ne l'ai pas vu sur le chemin des fontaines. 70 ans plus tard, je marche aux côtés de Pierre, l'homme des sources, mon grand'père, guérisseur, aussi.
Fontaine du Guip, près du chantier naval. La mer est grise. Les bernaches, à l'abri du vent, se laissent ballotter dans les vagues.
Fontaines de Salzen, de Kerno, de Kerquecu. Fontaine du Vran. Je remarque son absence. Elle est passée en courant, pieds nus drapée dans un poncho de laine, sans un regard.
Puits du Naudeux, puits du Gras-Houarn. Fontaine du Guerric. Je suis adolescent.
Fontaine du Prado, Puits de l'Eglise. A la pointe du Trec'h, j'ai 60 ans
.
Fontaine du Lerin, à genoux sur la margelle, je lave mon vieux visage. J'ai presque fait le tour de l'île et celui de ma vie. J'ai 76 ans.

Je pousse à nouveau jusqu'à la pointe de Brouel.
7 pierres pour le puits Naudeux,
7 pierres pour le puits du Gras Houarn.
7 pierres pour la mer.
Un cairn pour Pierre,

Mon grand'père qui casse la croûte,
à la fontaine du Guerric.


Si nos morts nous appartiennent, nous leur appartenons. aussi.



Merci grand-père, pour les dons que tu m'as transmis.
Roger Dautais

Land artiste
En Bretagne 5.17 heures
En mes nuits d'insomnie.


LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Photo : création land art de Roger Dautais
"Le don " à Pierre Dautais, mon grand Père
Île de Saint Cado - Morbihan

Cairn au couchant   :  pour Marty

Aux marcheurs du bout de l'An




un jour avec, un autre sans...

Voilà deux jours qu'une pluie fine et tenace tombe sur la région. En début de semaine, j'ai tenté une sortie. Marcher par un temps pareil rend difficile la moindre installation. Je laisse passer la nuit et le lendemain matin, une légère accalmie me redonne espoir. Je prends la direction des plages.
Dans le chemin creux qui mène aux grèves, j'aperçois la mer, calme et au bas. Avec un coefficient de 94, elle aura bien dégagé l'estran. Mais sur ces côtes, le paysage est à découvrir au dernier moment car les empierrements peuvent disparaître sous des tonnes de sable, d'une semaine à l'autre.
Je marche plein nord. L'air marin me fouette le visage. Il ne fait que 3 degrés et je vais travailler les mains dans l'eau. Aujourd'hui, pas de spirales possibles, tout le sable est mouillé, trop tassé. Je vais donc monter des cairns. Ce seront les derniers de l'année. Aujourd'hui, j'ai la main et trouve facilement les points d'équilibre. Je suis encore limité dans le portage des pierres depuis mon accident du 9 mai. C'est un vrai plaisir que de choisir chaque pierre, l'apporter au lieu choisi et monter le cairn, face à la mer.
Je change d'axe de marche et remonte vers l'est. Je croise quelques marcheurs emmitouflés. Ils me saluent. Sur mon trajet, je trace une figure géométrique dans le sable mouillé. Elle s'intègre bien au mouvement laissé par la mer, en se retirant, d'ici.
Je découvre , dans un rayon d'une vingtaine de mètres, une réserve de pierres blanches, alors que l'estran est couvert de goémon noir à cet endroit. Elle auront passé un très long temps sous les sables avant d'être découvertes, ce qui aura préservé leur blancheur. Dans deux mois, elles seront colonisées par les d'algues.
Je les regroupe en un ensemble de personnages que je désigne comme étant, les marcheurs du bout de l'an. C'est à eux que reviendra la mission d'aller vers cette nouvelle année, parmi les grèves.
Mon imagination m'emporte avec eux. J'ai tellement envie d'enchanter ce monde gris, que parfois, je me laisse prendre au jeu de cette transformation.
Avec ce jour de soleil, comme une trêve au milieu de la dernière semaine de l'année, je n'ai réalisé que la moitié de mon projet. Je dois, maintenant, travailler à l'intérieur des terres.../

Roger Dautais
Notes de land art pour ma mémoire amnésique.

Vous étiez affairés,
 aux courses pour les fêtes du jour de  l'an, 
Je passais ma vie d'estran en estran.


***

Au réveil
Ce ne sont qu' illusions
Le rêve lui, vient au moment du sommeil
Compagnons de jeux de l'enfance
Peut-être amis de longue date.../
Ai Qing,( 1910-1996)

Ce poète Chinois a connu l'emprisonnement, l'exil et la tourmente de la Révolution culturelle et n'est autorisé à publier ces écrits qu'en 1978.

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.