Liaison sur l'estran |
Un incident technique me privant de la possibilité d'accéder à mes fichiers de travaux récents, je présente une page non prévue mais qui j'espère vous conviendra malgré tout.
aux lecteurs du Chemin des Grands Jardins...
Je ne suis pas particulièrement tourné vers le passé mais je constate que depuis bientôt 14 années, je n'ai pas fait que de la figuration dans le monde du land art. Pourtant, je sais que je passerai sans la moindre reconnaissance officielle. Est-ce bien là, l'essentiel quand déjà, certains des "experts de l'art" en charge de cette fonction, ont passé. L'important aura d'avoir conquis un public large et divers, du plus jeune au plus âgé, avec parfois le plaisir de travailler avec eux.
Tous mes voyages à l'étranger m'ont permis de pratiquer le land art auprès de personnes n'en ayant jamais entendu parler, de confronter les cultures, d'échanger sur le plan artistique avec une richesse humaine et une fraternité que je ne connaissais pas en France.
Je conserve, après ces nombreuses années de partique, hormis un physique parfois mis en difficulté, la même fraîcheur, la même envie de découvrir, ce que la nature peut m'apporter. J'aime marcher, me déplacer dans le paysage et en particulier sur les plages, pour me mettre à sa disposition. Rien n'arrive si je ne suis pas d'abord dans cet état d'esprit, dans ce dénuement, sans idée préconçue. L'inspiration me surprend alors que je pensais être au bout d'un processus de création. Il faut être prêt. Il faut de l'humilité dans la démarche. Il faut tout oublier pour retrouver le nouveau geste, dépasser l'aspect d'une pierre et lui prêter une autre vie éphémère, parce que le rêve est présent. L'enfance est là, en moi, qui se réveille, avec ses douleurs, ses errances. C'est elle qui mêne la danse parfois et je suis encore, à 70 ans, ce petits garçon aux genoux écorchés qui joue dans les ruines d'une guerre dont on porte des cicatrices, toute sa vie.
On nous demande de me justifier sur mes choix, mes symboles présents dans une oeuvre qui avance, au jour le jour, sans plan de carrière. Il m'appartient de réaliser ce que je ressens, en puisant dans mes souvenirs, avec ma sensiblité. Ce qui m'échappe dans ces gestes et créations,c'est mon inconscient qui parle et je le laisse parler. Je préfère perdre une partie plutôt que de renier ce que je suis et certaines confrontations avec des extrémistes m'ont laissé sur le carreau. L'important est de se relever.Je ne pense pas qu'une vie d'artiste soit de vivre en paix mais plutôt de la préparer et cela, forcement, se paye cash.
J'aime partir. J'aime le voyage, qu'il soit lointain ou intérieur, ce déplacement m'est de plus en plus nécéssaire pour continuer une vie libre, sans rien oublier de ce qui se passe autour de moi.
L'ouverture de ce blog me permet aussi d'autres contacts, toujours plus nombreux, dont je vous remercie. Je lis avec intérêt et attention chaque commentaire. Ils m'ont apportés depuis ces années, beaucoup d'amitié et de chaleur humaine, ce qui prouve que le land art est aussi un art de communication et d'échange.
J'espère être en mesure de vous présenter de nouveaux travaux la semaine prochaine.
Roger Dautais
Demain est là
Avec son cortège
De charitons chamarrés
Etrange cohorte
Etrange danse
Des jours noirs
Qui avance
Entre les épais buissons
Des souvenances.
Les mots s’accrochent
Aux portes closes
Des rues désertes dépavées.
Les fosses de l’An Neuf
Sont ouvertes.
Ils reposent sur le dos
Les gisants aux yeux
Terreux.
Ils interpellent la nuit
De leurs cris de glaise :
« Le monde est beau,
Le monde est beau ».
Mais il n’est plus
Qu’une poignée de terre
Gelée sur leurs ventres de sapin vernis.
Enfouis, les souvenirs
De bombance et de ripaille.
Nos reliques délitées s’effilochent
Et la fraternité
Rejoint le lexique des mots déchus,
Exsangue.
Le jour saigné à blanc
Rêve d’un été plus clément. Un rêve chasse l’autre.
Les fosses recouvertes
Nous danserons
Sur nos bonnes intentions.
Nous rejoindrons l’étrange cohorte
Des veuves noires avides
D’amour et de vin de paille.
Une herbe rase
Comme une mémoire amnésique
Recouvrira nos restes
Sous la lune que
Trente Sabbats ne suffiront
A raviver.
Roger Dautais
Aux ombres, l’An Neuf.
en Normandie. 2013
www.recoursaupoeme.fr/poètes/ataol-behramoğlu