Le cairn de 15 heures 38 : pour Dolors reig Vilarubla Un trou dans le ciel : pour Youenn Gwernig |
( Série exil ) : La double peine : Pour Luce Lapin |
( Série exil ) La dernière chance : pour Tossan |
Mémoires fracassées : pour Guy Allix |
Le milieu du jour : pour France Les hasards : pour Lune Mar Légendes en marche : pour Nathanaëlle |
0ffrande à marée montante : pour Karine Maussière |
Interface : pour Danièle Duteil |
Salutation au soleil couchant : pour Vincent Dautais |
L'écho des rives : Pour Thibault Germain |
Angle pour vue : Pour Marité/Alénor Scarface : |
Les silences entendus : pour Marie-Josée Christien |
Les petites intentions : pour Marie-Claude |
à Marie-Claude
Le grand cairn aura une belle vie. Les nuages défilent d'Ouest en Est, poussés par un vent de force 4. J'ai trouvé refuge au creux d'une falaise à pierres blanches, pour pouvoir élever ce cairn. Le premières pierre sont très lourdes, trente kilos et plus.Les déplacer dans le pierrier est toujours difficile. Cela demande un effort intense, et c'est dangereux pour les chevilles. Il faut prendre son temps pour assurer la pose de la première. Une bonne assise procure les meilleures conditions pour élever un cairn. Si l'une des pierres a une petite bascule, il faut la caler immédiatement. Cela évite l'écroulement inattendu. Lorsque j'arrive à la flèche, c'est le vent qui m'indique jusqu'où je peux monter. C'est toujours étonnant de voir bouger un cairn. On dirait que les pierres respirent. Je pense souvent à Youenn Gwernig. Ce cairn sera pour lui.
Déchirante solitude que celle de l'aigrette blessée et que personne ne peut aider.
Le printemps s’affiche en gris, ciel plombé et mer argentée. Le vent est au Nord. Je ne peux travailler que bien couvert. L'eau est glacée dans les mares. Je remonte un peu vers les falaises pour me mettre à l'abri et commence ma série de cairns. Une fois lancé dans le travail, j'oublie ces conditions pénibles, et puis, elles ne se verront pas sur la photo. C'est quand même pénible de se faire allumer toujours pour les mêmes choses par des personnes dont le seule difficulté est de regarder mes photos de land art, bien installés devant leur ordinateur. Encore, la semaine dernière, un type m'a écrit pour me dire qu'après moi, il fallait faire passer un bulldozer pour remettre en place tout ce que je déplaçais. Il n'a jamais vu un travailler un bulldozer de près, ce qu'il déplace, ni ce que je fais non plus !
J'ai quitté la route où je marchais depuis un bon moment, ne pouvant pas faire autrement pour accéder à l'endroit choisi. Un piéton gène aussi sur la route et certains automobilistes me rasent de si près que je me demande si, leur intention, ne serais pas tout simplement de me foutre au fossé. Ce ne sera pas pour cette fois. Me voici donc prêt à remonter une grande partie de la rivière, sur la rive droite, dont l'accès est barré d'un barbelé. Un de plus. Je dois descendre une pente à 45°, dans un petit bois pour atteindre la rive. Je prends mon temps pour y arriver en entier, car de gros rochers affleurent ça et là. Je commence ma progression au bord de l'eau. La rivière s'élargit . J'aimerai monter quelques cairns. J'arrive dans une courbe et j'aperçois quelques pierres libres, proches de l'eau mais faciles à attraper. J'en fait provision et je commence le travail. Le cadre est magnifique, la rivière plus étroite. Les arbres s'avancent au dessus-de l'eau et filtrent la lumière. Une fois les plus grosses pierres installées, je complète le cairn de petites intentions, comme je fais sur des lieux de mémoire, tombes ou autres. Et voici qu’une histoire nait sous mes yeux. Je pense à celle qui m'attend à la maison. Ce cairn sera plus elle.
Pendant ces quinze derniers jours, je serais resté en permanence au contact de l'eau. Je l'ai parfois cherchée, mais c'est souvent elle qui est venue à ma rencontre. Je me suis calé dans mon propre temps, laissant la folie du monde à sa course incessante.
460 personnes ont péri en mer en Méditerranée, ces jours derniers. Le drame absolu de ces gens exilés, dont personne ne veut, à part les passeurs. Mes modestes installations sur l'exil sont un rappel de ce drame permanent.
Roger Dautais
D'infini un silence une lumière
être
la vertigineuse approche d'une déflagrante nuit
une impensée une
démesure de cet univers tournoyant
une inversée une
alternance d’abîme infini
un vertigineux vestige une
espérance d'un théâtre de l'être
une audace un espace de lumière où
le gouffre la nuit le jour se
fondent s'ensemencent
en infinie noirceur en silence immense
Alain Raguet *
* http://www.recoursaupoeme.fr/critiques/sur-deux-livres-r%C3%A9cents-d%E2%80%99alain-raguet/matthieu-baumier