Aux quatre vents |
Première approche |
Cueillir, signer, partir |
Cairn des quatre vents |
Cardinaux rouges |
Résumer un été qui s'en va |
Remember |
Écrire dans le silence de la plaine |
Territoire d'oubli |
Rayonnement |
Rappel |
Bois flottés |
Colère de métallos |
Viver não é necessário; o que é necessário é criar."
Fernando Pessoa
Fernando Pessoa
Demain sera un autre jour...
Marcher, cueillir, tracer, partir. Je vis dans ce rythme depuis trois jours dans cet été finissant. Peur de le perdre, angoisse de la prochaine saison...et si c'était le dernier. Cela me sert de moteur et j'avance. Je vais visiter trois sites : la grande friche industrielle de la SMN ( Société de Métallurgie Normande) qui domine la ville depuis son plateau, la zone d’embarquement d sur l'Orne, de ce même site et l'ancien emplacement des silos à grain d'Hermanville et sa vue imprenable sur la mer. Par beau temps, je vois le Havre qui se trouve à 60 km à vol d'oiseau.
J'ai choisi ces lieux déserts parce qu'à première vue, ils n'offrent pas de quoi travailler sur la couleur et que la matière est rare.Je vais donc, dans un rayon d'une dizaine de mètres, cueillir de quoi constituer une petite installation qui rassemblera, baies, fruits, ou végétaux. Exercice long et difficile, mais intéressant.(Photo 6) d'autant plus que je le réalise à quelques mètres de l'Orne où les foulques s'en donnent à cœur joie et me tiennent compagnie.
Le deuxième jour, je monte sur le plateau puis après une marche de mise en route, je pose mon sac non loin d'un étang où j'ai parfois travaillé.Ce plateau qui domine l'Orne accueille de nouvelles entreprises, ayant pris la place de l'ex-SMN, présente encore de très grands espaces déserts où le vent, quand il souffle ne fait pas de cadeaux. Aujourd'hui, tout est calme. Après la cueillette qui s'impose, je trace une sorte de roue à laquelle je vais ajouter quatre pointes orientées, Nord, Sud, Est ,Ouest.Je ne suis pas très satisfait du résultat. Je me déplace un peu et trouve un os d'animal, avec lequel j'avais déjà composé, enfoui sous les herbes et j'imagine un signe de protestation contre la fermeture de ce site industriel.(Dernière photo)
Le troisième jour, j'arrive sur un des points dominants au nord de la Plaine de Caen où s'élevaient des silos à grain, servant aux paysans de la région, au moment des moissons. Il reste un tout petit bâtiment et les vestiges de la bascule où les tracteurs tirants d'immenses remorques, venaient peser leurs chargements. Le vent est au Nord Ouest, un léger crachin, limite la vison sur le large et, aujourd'hui, je ne verrai pas le Havre.
Ici, c'est encore plus désert que sur les deux précédents sites et il faut avoir de l'imagination pour trouver une idée de départ. Un grand plateau de fer rouillé, dont la couleur et le graphisme sont intéressants me servira de fond. Je trace un premier signe ( photo 3) qui me vient à l'idée, sorte d'offrande aux vents. Puis, je vais travailler sur la forme d'un carré auquel je vais donner un premier aspect, puis un second, en composant avec ce que j'ai sous la main, c'est à dire, peu.(Photos 1et 2)Un cairn terminera cette sortie, avec le sentiment que demain sera un autre jour...
Roger Dautais
Voici le billet que j'ai reçu un jour de Serge mathurin Thebault:
" Je baguenaude en ce moment dans l'oeuvre de Ferando Pessoa. Il m'en est venu un poème que je vous soumets en ce dimanche, et surtout une invitation si vous ne connaissez pas d'aller vous baigner dans les terres de cet alcoolique céleste, diamantaire des mots et des émotions. Moi, j'y trouve une joie intense dans son livre de l'intranquillité (éditions Bourgois)"
J'ai trouvé le texte si beau que je lui ai demandé l'autorisation de le publier, ici Autorisation aussitôt accordée.
Merci Serge
On ne râle pas avec ces mots
On fait avec c’est tout
Et si l’exercice est périlleux
On s’en sort bien malgré tout
D’évacuer avec une certaine élégance
Les remugles qui vous dévorent l’intérieur
Il y a un gouffre entre cette énergie
De création et le résultat qui en découle
On enragerait presque si par mégarde
On oubliait la place de l’homme en son individu
Dans le conglomérat de la matière :
Rien est bien le substantif qui convient
Pour encourager le galérien
- Ce moi en ses chaînes empêtré-
Je volète parmi les feuillets hypnotisant
De Fernando Pessoa
Dans le livre de son intranquilité
Je note cette phrase dans l’œuvre sœur
« Je gis la vie. Rien de moi n’interrompt
absolument rien »
Mes doigts glissent alors sur le clavier
Enthousiastes, portés
Par une volonté d’exister
Au sein du nihilisme qui la crée.
Serge mathurin THEBAULT