Solitude : Pour Chrys En revenant de Kerangoff : pour Claude Amstutz * |
Cairn des randonneurs : pour France L'alerte : pour Thérèse |
Grand passage : pour Ana Minguez Corella |
Enfants de chênes : pour Anne Le Maître |
Mécanique des plages : pour Maïté/Alienor |
La cabane du pêcheur : pour Tossan |
Réunion de chantier à Porz Pesket : pour Joan Fuentes |
Break danse : pour Christian Cottard |
Le chant des cupules : pour Pastelle |
Kernevest Blues : pour Noushka L'enfant de quelqu'un : pour Aylan Kurdi Guetteur de marée : pour Umiko Okasan |
Songe d'un jour d'été à Lampedusa : pour Guy Allix |
L' étranger
Ne me demandez plus d'où je viens, je suis étranger. Ce n'est pas le mail reçu hier qui me fera changer d'avis. Il contenait une phrase de Cocteau que je vous livre : être libre, c'est s'exercer à n'être rien ".
Des ondes de silence montent de la mer et dénotent dans ce bruit du monde qui chante, vous êtes de trop, partez, laissez nous notre pain. Mais je ne fais que ça, partir. Trop ceci, trop cela, trop jeune, trop vieux, trop malade, le monde crève de ne pas vouloir partager.
L'autre rive est atteinte sous les frondaisons. J'ai perdu pied au creux des grosses pierres, l'instant d'une apnée. Mes deux mains saisissent le futur. Je le happe, je m'agrippe, me hisse sur la berge, habits trempés.
Ici, la mort est toujours solitaire. Peut-être un ou deux pêcheurs de truite qui passeraitpar là, pour donner l'alerte, signaler un corps. Rien de plus.
Je n'ai pas rêvé pareille fin, simple constat. Cela peut arriver.
L'abondance des branches d'arbres filtre les rayons de soleil, jusqu'à installer une ombre profonde qui rend l'eau, noire. A l'instant même, je rêve aux falaises de Ty Bihan, inondées de soleil. Ce sera pour demain. Je suis à l’œuvre, ici, je dois aller jusqu'au bout.
Entre deux haies,découverte d'une moissonneuse batteuse, rongée par la rouille. J'en prélève quelques pièces. Je veux leur faire connaître les sables de l'océan. La rencontre terre-mer est intéressante qui crée une autre mécanique de plage, soulignée par quelques baies. Je recommencerai ce mariage sur la route de Porz pezket avec des chutes de bastaings. Ça sent le chantier, les cris des compagnons d'une maison l'autre. J'y installe une circulation, un ordre inconnu que les sables garderont en mémoire.
J'ai regardé les étoiles, y cherchant une amie. Hier, c'était Alpha de Céphée, une étrangère. Elle passait son chemin.
Le monde est fait de tant de bruits, d'alertes, de nouvelles si nombreuses qu'on ne sait plus. Les médias nous parlent de l'enfant de quelqu'un, âgé de 3 ans. Il était Syrien, petit réfugié suivant ses parents. Son corps noyé vient d'être rejeté sur une plage après le naufrage de leur bateau. L'opinion se déchaine Ils sont en trop, eux aussi.
Je descends vers la rivière, avant le lever du jour. J'y élève, un seul cairn, pour rendre hommage à Aylan, dans l' anonymat d'une ria qui s'éveille.
J'aime me lever de très bonne heure lorsque les jours raccourcissent et m'offrent un supplément de nuit à vivre éveillé sous les dernières étoiles.
Je lui ai répété, écrire n'arrange rien, bien au contraire, mais comment faire autrement dans ce tapage quotidien. Elle m'a répondu par une phrase de Sophocle : " Libre est la race des poètes" Il serait un peu tard, maintenant de changer de camp.
Étrange pays qui résiste à l'étranger que je suis. Je comble des vides mais jamais je n'arriverai à tutoyer e ciel. La solitude me permet de tout trier, mieux comprendre. Face à mes pierres, pas de mensonge, de faux semblant, la réponse est immédiate et je le paye d'ailleurs d'une blessure au dos.
Tous les matins, j'embarque avec le capharnaüm de mes idées, pour une navigation hauturière. J'aime naviguer dans l'étrave de l'Ikaria Lo, et de son capitaine Alain Jégou*, parti tutoyer les étoiles le 6 mai 2013.
Roger Dautais
*Retrouvez l’œuvre du poète Alain Jegou
https://fr.wikipedia.org/wiki/Alain_J%C3%A9gou
*Retrouvez le poète Claude Amstutz
http://lasciereveuse.hautetfort.com/
Place à l'imagination mon Momo
Ou la folie si tu veux
La vie s'égoutte entre deux platanes il
Y a de la morphine dans l'écorce
Gélatineuse des raisons Voilà toi
Où tu m'amènes
Naviguer dans les pas de l'espace
En plein coeur de l'oeuvre d'Artaud
Serge Mathurin Thébault*
In FIGURES
textes de Serge Mathurin Thébault
Gravures de Marie-Hélène Lorcy
Editions Thamé 2015
* Pour retrouver Serge-Mathurin Thébault
http://www.art-chignaned.com/spip/article.php3?id_article=113