Dialogue de sourds : pour Christian Cottard |
Haïku : pour Danièle Duteil |
Echo de Lampedusa : Pour Marie-Josée Christien |
Les frères de la côte : pour Juliana |
Le guetteur de marée : pour Marty |
Fenêtre sur les dormantes : pour Arlettart |
Vers l'au-delà : pour Thibault Germain |
L'appel noir : pour Ceciely |
Identité Breizh : pour Patrick Lucas |
Mandala de la cabane du pêcheur : pour France |
Franchissement : Pour Maïté/Alienor |
Grand cairn de St Jean : pour Inès( Magia da) |
L'appel du large : pour Remei |
Zen , l'heure bleue : pour Marie-Claude |
Hommage au Loc'h : pour Marie |
Rêves rouges : pour Gil Zetbase |
L'adieu : pour Thérèse |
Route 72
Être d'ailleurs et le rester, parce que, maintenant, l'ailleurs s'impose.
Je me tiens au bord du monde.
Répit
La côte est déserte. La mer est turquoise pour m’accueillir sous un léger voile de brume. C'est ici que je reprends la route 72; La mort s'est invitée à notre table. Nous avons mesuré notre impuissance et le poids du destin à faire pencher la balance.On ne pouvait qu'espérer. Elle nous a laissé gagner. Merci.
Ce qui échappe
Insituable, cette rencontre entre cinq pierres jointes par l'eau de la rivière. Ce cairn est né dans l'absence, le vide. J'avais fini par perdre pied dans cette violente peine qui m'écrasait.
Lampedusa
J'aime cette transformation lente qui part d'une obsession et se termine par un constat : une fois dressées contre le scandale, ces pierres sont douées d'une lucidité farouche. Deux heures de ma vie consacrées à prolonger ce cri d'indignation dans la plus parfaite indifférence. La semaine passée, 4500 vies ont été confiées entre les mains des passeurs.
Je suis où, à présent ? Rester ici, en attendant que la mer monte, remplisse l'espace déserté par elle, me semble la meilleure solution. Un sentiment de plénitude m'apaise jusqu'à me lier avec l'espace. Les premiers cairns seront de pure consolation, n'en déplaise aux juges. Les autres viendront pendant la période de convalescence.
La brume s'accroche à l'océan, au ras de l'eau. Au lever du jour, elle s'effilochera pour que la lumière advienne. Dans l'instant présent, elle devient belle compagne de mes travaux fragiles.
J'ai l'impression que le ciel est devenu plus lointain, plus profond, plus haut pour me laisser de la place. Je gagne en respiration ce que je perd en sentiment de proximité avec lui.
Le balancement des pierres n'est pas évident,aujourd'hui. Elles résistent et je serais bien mauvais perdant, si, je leur en voulais, une seule seconde. C'est une évidence, la lenteur de mes gestes, s'impose, si je veux réussir à élever quelques cairns aujourd'hui.
Marcher, écarter les ronces, fouler le sol en soulevant de la poussière, se baisser, cueillir, ramasser, tous ces gestes simples sont capables de refléter le monde. Il faut en être conscient.
Affronter mon destin en marchant, sans cesse, vers l'accomplissement.
Je grave d'un pied assuré, mon identité dans les sables de Locmariaquer. La spirale se déroule bien malgré quelques difficultés dues à la qualité du sol, à la pente de la plage. Une heure trente plus tard, je boucle cette spirale dans la solitude. Le soleil est pâle, la lumière, très moyenne, comme la photo. Ce qui compte après tout, c'est d'être là, à l’œuvre, malgré tout ce qui s'est passé.
Être d'ailleurs et le rester, parce que, maintenant, l'ailleurs s'impose. Je me tiens au bord du monde.
Roger Dautais
Merci à tous les lecteurs qui m'ont encouragé par leur lecture et pour certains, par des commentaires très touchants pendant ces cinq semaines de pause du Chemin des Grands Jardins.
Permanence
Ainsi l'aurore
sera-t-elle toujours au rendez-vous
alors que les hommes
se trahiront
que d'autre fraterniseront
et que les oies sauvages
continueront à ne pas se tromper de chemin
Isabelle Lagny
Extrait de " Le sillon des jours" Editions Le Temps des Cerises 2014