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Guetteurs de marée |
Pour Marie-Claude |
Breizh 2008 |
Aux pierres...
J'ai toujours été fasciné par les pierres et ce, depuis mon enfance.Qu'elles aient gardé leur liberté, leurs formes sauvages, voire agressives et blessantes ou polies par le temps, les eaux, j'ai ramassé ces pierres, je les ai déterrées, retournées, entassées, mises dans mes poches, prises à bras le corps pour les déplacer. Je les ai regardées, écoutées dans leur silence, questionnées et trouvé une réponse qui me satisfaisait, au-delà de leur mutisme.
Sur les grèves Bretonnes, j'ai souvent arrêté ma course pour contempler ces grèves de galets. A marée haute, j'en choisissais quelques-uns, les plus beaux, les plus lisses et les rejetais à la mer pour leur donner un sursis de liberté afin qu'ils ne terminent pas dans la poche des autres marcheurs.
Enfant, j'escaladais les vieux murs qui retenaient la terre des jardins en espalier. Leur apparente solidité était parfois trompeuse et je me retrouvais dans le jardin voisin, emporté dans ma chute par une pierre descellée, avec devant moi, le spectacle d' un mur éventré, poussiéreux. Alors je regardais cette béance fumante mise à découvert et qui représentait les entrailles d'un mur. Comme un chirurgien , j'autopsiais le cadavre et j'essayais de comprendre le cœur du mur avant de prélever "un organe" au plus profond de l'ensemble, persuadé qu'il détenait le secret du bâtisseur mais aussi qu'il avait échappé au regard de plusieurs générations de jardiniers. Je l'imaginais avoir entendu de lourds secrets, des souvenirs inavouables et des confidences amoureuses Je pensais qu'en prélevant cette pierre dans mes mains, je remonterai jusqu'à son enfance et qu'un jour, elle me parlerait.
Enfant, je bâtissais sur les plages Bretonnes, des châteaux de pierre sur le sable puis j'attendais que la mer les recouvre. Le lendemain, je retrouvais, pour mon plus grand plaisir, toutes les pierres écroulées en tas, comme si elles m'avaient attendu pour jouer à nouveau. Était-ce de ces souvenirs de guerre, au cœur de la quelle j'étais né, de bombardements, de peur, de maisons écroulées, de malheur qu'il fallait à tout prix transformer pour ne pas mourir, qu'était né cette passion des pierres. Je le crois maintenant.
L'imaginaire et la création m'auront permis de me sortir de bien des situations difficiles. J'aime toujours écouter ces pierre qui me fascinent. Au plus loin que je sis allé, en Égypte, sur le Nil, à Karnak, Assouan, en Nubie, Abu Simbel où bien au pied e la pyramide de Keops, j'ai ai écouté leur chant, du lever au coucher du soleil, élevé des cairns et reçu de leur part d'aussi beaux cadeaux en retour.
L’enchantement se mérite aussi. Si je n'avais plus rien à raconter, à créer, à montrer, probablement que je ne pratiquerais plus le land art mais vous comprenez qu'il est en prise directe avec mon enfance et que pour boucler la boucle, ce n'est pas si mal que cela. Et voilà pourquoi, je montre aujourd'hui beaucoup de travaux de pierres.
Roger Dautais
Vous me demandez parfois ce que veulent dire les légendes de mes photos. Parfois, je réponds, parfois,pas. Pour la première photo je l'ai ainsi appelée,"Déchirure" parce que je me suis blessé en quittant la pente de terrain où je travaillais, après l'avoir réalisée en une heure.Résultats une déchirure musculaire très sérieuse et très douloureuse à la jambe,qui m'impose 6 semaines d'arrêt.
par delà les flétrissures
on plongerait dans cette mer
en contrebas des paupières
de derrière la fenêtre on remâcherait
la prière de l’écume
que l’humidité n’épouse pas le rance
qui érode nos fronts
alors s’envoler loin dans le roulis des vagues
blesser nos pieds sur les galets
ensabler nos mains creuser se salir
jusqu’au goudron qui glue au corps
se barbouiller suture cachou, réglisse
marcher crabe à reculons
vers la mandorle de l’enfance
Sylvia Härri