La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

mercredi 31 octobre 2018

Passion d'estran  : pour Marie-Claude



Notre mémoire est hors de nous,
dans un souffle pluvieux du temps.
Annie Ernaux

pour Liza Chavez

Après cette période furieuse qui a fait de la casse sur les côtes, la mer reprend ses marques. Elle respire, présente et calme.Les grands pins abattus par la tempête, ont été débités sur place, dans le petit bois qui jouxte la plage, puis chargés sur de gros camions.
Il me fallait retourner à la mer, par beau temps et parler d'amour. Parcourant le pierrier, j'ai choisi deux pierres qui semblaient faites pour s'aimer. Je les installées, face à la mer, et lié, avec un cordon rouge. Amour -passion , longue route à deux, comme celle parcourue avec ma femme, depuis 52 années. Je n'avais rien à ajouter. D'ailleurs, ces pierres ont tout de suite attiré l'attention, des promeneurs, les photographiant depuis le chemin des douanier, du haut des falaises.
J'ai eu beaucoup de plaisir à les laisser vivre cette passion d'estran, face à l'océan.
Roger Dautais.
Notes de Land art pour la Route 75

Photo : création land art de Roger Dautais
" Passion d'estran " pour Marie-Claude.
Bretagne Sud

Beaucoup de mes photos land art se baladent sur le Net " empruntées " par des blogueurs qui veulent me rendre hommage à leur façon, et c'est en général assez bien fait. Cela me fait plaisir, bien sûr. D'autres fois des inconnus, créent à partir de mes images. C'est le cas aujourd'hui. Je n'imprime jamais un citation directement sur mes photos, mais,que faire ? Et puis Montaigne, ça me plait bien. Alors, à mon tour je me suis servi de ce montage pour le présenter aujourd'hui.
Merci à cet inconnu d'avoir enrichi ma création.
Bien amicalement.
Roger Dautais

lundi 29 octobre 2018

Salutation au soleil  :  à Marie-Claude



un jour avec, un autre sans...

Voilà deux jours qu'une pluie fine et tenace tombe sur la région. En début de semaine, j'ai tenté une sortie. Marcher par un temps pareil rend difficile la moindre installation. Je laisse passer la nuit et le lendemain matin, une légère accalmie me redonne espoir. Je prends la direction des plages.
Dans le chemin creux qui mène aux grèves, j'aperçois la mer, calme et au bas. Avec un coefficient de 94, elle aura bien dégagé l'estran. Mais sur ces côtes, le paysage est à découvrir au dernier moment car les empierrements peuvent disparaître sous des tonnes de sable, d'une semaine à l'autre.
Je marche plein nord. L'air marin me fouette le visage. Il ne fait que 3 degrés et je vais travailler les mains dans l'eau. Aujourd'hui, pas de spirales possibles, tout le sable est mouillé, trop tassé. Je vais donc monter des cairns. Aujourd'hui, j'ai la main et trouve facilement les points d'équilibre. C'est un vrai plaisir que de choisir chaque pierre, l'apporter au lieu choisi et monter le cairn, face à la mer.
Je change d'axe de marche et remonte vers l'est. Je croise quelques marcheurs emmitouflés. Ils me saluent. Sur mon trajet, je trace une figure géométrique dans le sable mouillé. Elle s'intègre bien au mouvement laissé par la mer, en se retirant, d'ici.../

Roger Dautais
Notes de land art pour la Route 75

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/ "Salutation au soleil " pour Marie-Claude
Normandie - 2008


*



L'arbre fait le mort
tout l'hiver
sous la voix d'oracle
du vent

Il observe en silence
le fond du monde par ses racines

Il nous enracine dans le ciel vide.


Marie-Josée Christien

Les extraits du temps
(Les éditions sauvages )

samedi 27 octobre 2018

"Eros et Thanatos"  pour Jacques Vico +



Pour moi, le land art... une nécessité, une urgence.
R.D.

... Il arrive que les lumières éclairent notre part d'ombre et nous voici réconciliés avec le monde alentour. Hors cadre, la vie nous attend, nous échappe à chaque tournant. Qu'une page blanche survienne dans notre nuit et le vacarme des incertitudes recommence, incessant. Il questionne l'inconscient. La lumière propose, l'objectif fixe, écarte, élude. Restent les mémoires à oubli. Ainsi va la vie.
L'oubli règle à peu près tout et parfois, dans notre propre vie, il nous englobe dans sa béance.
Roger Dautais


Notes de land art pour La Route 75
LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot. com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" Éros et Thanatos " à Jacques Vico
Saint Germain Blanche Herbe Normandie 2008


*


" Gracieuse
en ces vieux gestes
l'aube essore
avec soin la mer

Le soleil met à la baie
sa nappe bleue
sans une tâche de temps
de guerre de marée noire

Bien peu répondent
a l'invitation
accordent au jour
des yeux prêts au regard "


Anne-Josée Lemonnier *

Falaise de proue 2003

* http://www.barapoemes.net/archives/2017/11/06/35840850.html

mardi 23 octobre 2018

Mémoires empilées  :  pour Erin



En confidences d'automne...

.../Le premier cairn se dresse sur une base assez lourde que j'ai du mal à porter. Ce travail de force me plait . Il sera suivi d'un travail de recherche d'équilibre, plus fin, plus subtile. La mer déroule de petites vagues blanches qui viennent me mouiller les pieds. Il y a beaucoup de pierres, des milliers, mais chaque cairn est particulier. Les pierres me parlent, je les sens, les choisis, à l’œil, puis les tourne, les retourne, les palpe, les lave, les essuie, une à une. Il faut qu'elles se plaisent, qu'elles s'accordent, qu'elles s'entendent. Et puis, elles 's'amourachent, vivent leur vie de cairn, et m'oublient. On dirait qu'elles sont la à pour une éternité. Et c'est long une éternité de cairn. Elle se terminera dans l'éphémère d'une volonté suprême et finira par enlacer la loi universelle de l'entropie, rejoignant la foule des pierres anonyme qui jonche la plage.
Je suis heureux comme un enfant qui retrouverai un peu de liberté après l'école.../
Roger Dautais
Notes de Land art pour La Route 75

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" Mémoires empilées " pour Erin
Luc sur Mer - Normandie


*


Nue
Frileusement venue,
Devenue elle sans raison, ne sachant
Quel simulacre de l'amour appeler en image
(belle d'un doute inachevé
vague après vague,
et comme inadvenue aux lèvres), ici
d'une autre qui n'est plus
que sa feinte substance nommée


Miroir, abusive nacelle,
eau de pur silex.


Roger Giroux
L'arbre le temps.

lundi 22 octobre 2018

Gemellité  : pour Océanique




La source du temps

Silence, le plus digne hommage !
Quel tumulte d'amour emplit jamais le très profond silence ?
Victor Segalen


Parenthèse ...
Le land art me relie à l'humanité, à l'histoire du monde et me permet d'être moins seul. Il me permet aussi de dire ce que personne ne voudrait entendre autrement. C'est un dialogue entre la terre et moi, entre la mer et moi dont il s'échappe quelques bribes pour les oreilles attentives. Pour le reste des gens, c'est un amusement, une occupation, à la manière des saltimbanques , des peintres ,des chanteurs, des poètes qui à leurs yeux ne servent pas à grand chose.
Ceci n'est pas très grave, je poursuis un chemin d'expérimentation de ma propre vie et j'en suis le premier spectateur. Je me souviens de la phrase de Youenn Gwernig qui disait : "car il faut que chacun compose le poème de sa vie" et cela me suffit comme programme.
C'est dans l'humilité d'un art comme le land art et dans sa pratique quasi journalière que j'inscris ces mots. Penché vers la terre, le dos courbé, je me dis qu'un jour elle arrivera bien par finir de m'accueillir. Je ne suis pas pressé, seulement, prêt.
Roger Dautais
Notes de land art pour La Route 75

Photo : création land art de Roger Dautais
" Gémellité " pour Océanique
Côte Nord du Calvados
Normandie -


*



Yeux de silence.


J'écoute tes yeux de silence
Brandir ce que tu n'oses dire
Brave espoir
Tu exerces ta profession
En intimidant les audacieux
Pour comprendre l'importance
De la couleur des eaux inaccessibles
De la foudre corporelle
De la création d'un cosmos
Où se pavane la liberté
Comme les doigts entremêlés
Regardant un dialogue confidentiel
Argenté de thèmes édifiants
De soleil brûlant
D'essence étincelant la mesure
Pour que ravive le printemps
Royaume des soucis impuissants
Que le sourire pervenche
Écoute avec des yeux de silence.


Mohamed Attaf (Algérie)

samedi 20 octobre 2018

Paroles rouges  :  pour Marie-Josée Christien


.../
Et la vie passe s’efface, existe, malgré tout.
Ce sera bientôt, les cernes d'hiver, les jours gris, les pluies incessantes, lavant les terres noires de la Pointe du Roselier. Ce sera aussi, les longues nuits solitaires passées à hurler comme un loup. Il restera, malgré le temps, malgré les routes empruntées, à suivre les souvenirs de l'été.
Il restera à retrouver les pas des voyageurs de l'au-delà, et puis leurs voix qui répéteront sans cesse :
Dans la mémoire des routes,
il y a toujours des bruits de pas
des matins ensoleillés,
d'autres pluvieux,
des pierres sèches
et d'autres recouverts de mousse.
Et je reconnaitrai ta voix défunte et je me dirai, tiens, cette fois, c'est elle qui m'invite à entrer dans la mémoire des morts. J'y entrerai et je reprendrai la route.
Personne ne m' empêchera de descendre au cœur du fleuve, d'y noyer ma peine, d'en retirer les pierres nécessaires à l'élévation de trois cairns. Ainsi se mêlent souvenirs défunts et vie difficile, pour exister un peu.
Roger Dautais
Notes de land art pour La Route 75

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http::rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" Paroles rouges " pour Marie-Josée Christien 2007


*


Nous cheminons tous
oubliant que nous fûmes bercés
sur des chemins de terre
éclairés de néons


La route familière
s'efface sous une brume intense.



Nous marchons cependant
car il faut bien aller
quêtant les étincelles d'amour
dans le flux des saisons.

Eliane Biedermann

jeudi 18 octobre 2018

Occurrences Celtes   :  à Christian Cottard
 
 
Il est des jours de travail ordinaire qu'il convient d'offrir
à la nature, afin que l'invisible prenne le pas sur le réel...
R.D.


Dans les plis des mémoires empilées se nichent la foule des rêves stratifiés. Je tire le fil d'Ariane et traverse le temps jusqu'au rivage.
L'apaisant chaos de pierres me parle. Ici est passée la tempête et la rondeur des pierres en est la preuve. Un goéland perché sur les rochers, porteur d'âme en peine, m'indique le lieu du travail.
Entre le silence de la mer et les dires hystériques des sternes, je retrouve mon pays.
J'avance doucement vers la conclusion. Ici, l'espace me délivre. Je n'ai plus à supporter mon tumulte intérieur.
En écho, la voix de Driss, disparu : " demain sera un autre jour".

Roger Dautais
Notes de land art pour la Route 75

Photo : création land art de Roger Dautais
" Occurrences celtes " pour Christian Cottard
Côte Sud de Bretagne
 
 
***


Donne toi à l'espace
Il est ta nature

Qu'il te déchante
Ou te reprenne dans les airs

Il est de pluie tu es de rêve
Tu danses sous la mer
Au doux chant des baisers

Quel regret a porté ta mémoire.

Brigitte Maillard

* http://www.mondeenpoesie.net/ ainsi que les autres blogs créés et animés par Brigitte Maillard avec talent et humilité !

lundi 15 octobre 2018

Rachis  : au Docteur Missoury


Tiré de l'oubli...

.../Je vous dis, la vie de land artiste, ce n'est pas fait pour ceux qui traversent dans les clous. C'est vraiment pour ressentir les choses. C'est fait pour sentir, voir, écouter, toucher et goûter la vie au milieu de la nature. C'est d'emmener avec soi tous ceux qui l'ont quittée. C'est chanter la vie, simplement ça, chanter la vie libre dans la brume naissante qui un jour ou l'autre remonte de la mer pour effacer les falaises à suicide.
J'ai repris la route vers les côtes, avec en tête cette phrase de Norge :
" Tout ce qui existe un instant existe toujours".
Mais alors, mes souvenirs...
Roger Dautais

*

à Myriam Montoya

Ne rien regretter
Ni le gel, ni le sol rugueux
Ni le dos cassé au travail
Se courber seulement,
Devant la Nature.

Roger Dautais

D'autres poèmes dans l'Anthologie subjective de Guy Allix
guyallix.art.officelive.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" Rachis " cairn en côte de Nacre
au Docteur Missoury

vendredi 12 octobre 2018

Spirale océane  :  à Marie-Claude
Au nom de l’alchimie du hasard…

J’ai beaucoup étudié le land art avant de le pratiquer. Il me fallait comprendre ce que j’allais donner à ma vie, comme nouvelle orientation, dans cette expérience unique et singulière.
J’avais 55 ans
Fallait-il crouler sous une production d’images de masse où alimenter ma propre réflexion ?
Maintenant, je peux dire, sans me tromper qu’en prenant la route chaque jour,les éléments extérieurs ont changé ce que j’ai créé en vingt ans.Cette alchimie du hasard, alimentée, sans cesse, par le paysage, les vents, les intempéries, les marées, a fait entrer dans le jeu créatif  , la notion d’imprévisible et cela me plaisait.
Lorsque j’ai choisi le land art, emboîtant les pas d’Ana Mendieta,j’ai quitté la foule et je suis rentré en résistance contre cette production de masse.
Je me suis mis dans l’incapacité de vivre sans la pratique de cet art difficile.
J’ai appris que la matière organique,contenait en elle, l’imprévisible et ça me rendait heureux .
Le sable de mer, si souvent travaillé dans mes spirales, change de texture, d’une plage à l’autre, de couleur, d’aspect physique, sec ou mouillé, fin ou granuleux.
Lorsque je réalise une spirale, je ne sais pas où elle m’amènera, physiquement, mentalement.
Pour obtenir un résultat vu sur cette photo,il m’a fallu, apprendre, expérimenter. Et pour expérimenter, il faut pratiquer.
C’est pourquoi, devenu handicapé, provisoirement, je me suis fixé comme objectif de réaliser la même spirale, qui scellerait mon retour au monde du land art.
J’approche de ce rêve. Encore quelques mois de soins et cela deviendra, j’espère une réalité..
Je me suis fixé comme règle de vie d’aller chercher l’impossible, non pas dans la possession matérielle, qui est vaine, selon moi, mais dans un ailleurs philosophique où le dépassement de ce qui est atteint, devient moteur et créateur d’espoir.
Qui peut se permettre de juger la raison de vivre de l’autre, même si c’est souvent la règle dans les réseaux sociaux ?
Le temps pour moi, n'est plus à la polémique. Il me reste simplement à prouver, dans les mois qui viennent avant de conclure, que je marche correctement et que j'ai retrouvé la force physique de tracer une dernière spirale.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

" Photo : création land art de Roger Dautais
" Spirale océane " * à Marie-Claude
Etel - Morbihan - Bretagne


***




Cercle

Tu es un frère
On peut s'entendre

Fais moi pareil,
Enferme moi.

Eugène Guillevvic

Du domaine 1977
Euclidiennes 1967 Gallimard

Réchauffons nous,
Vivons ensemble
Et méditons.

Eugène Guillevic

Du domaine 1977
Euclidiennes 1967 Gallimard

jeudi 11 octobre 2018

«  Flottaisons  » aux flaneuses


" Vous n'avez pas de morts, pauvre ami, pas du tout ?
Venez que je partage les miens, avec vous".
Georges Brassens


Mise au point...

De fantomatiques habitants des réseaux sociaux me disent agonisant. C’est faux. Je suis simplement sur la liste d’attente. Je m’écarte de ces glissements sémantiques malfaisants. Ils ont vite fait de vous enterrer vivants. Je milite pour la vérité nue de la pierre qui apostrophe et garde sa liberté d’être elle même. Suis-je un voleur d’images impénitent ou simplement un voyageur doué d’un sixième sens ?
L’Arte Povera m’inspire et j’aime l’extrême précarité d’un merle en hiver. Son chant, né de si peu, est une merveille. Je tente en vain, de l’imiter, dans la retenue des moyens.
Toutes liquidités libertaires abandonnées, je laisse les sponsor qui tentent l’aventure,à leur funeste sort.
J’assiste à une fantastique dégringolade d’idées. Mais laquelle saisir ?
Pourquoi ces flottaisons, au cœur de l’été ? Pourquoi pas une une noyade et qu’on n’en parle plus.
Le soleil se crispe sur les lentilles d’eau. Il se morfond, disparaît, m’endeuille puis revient. Il éclaire la scène. Incroyable résurrection dont je profite.
Roger Dautais


LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
«  Flottaisons  » aux flaneuses
Hérouville-Saint-Clair - Normandie 2007




« l’hiver
les serpents
dorment »

Daniel Biga *

https://www.babelio.com/auteur/Daniel-Biga/167476

mercredi 10 octobre 2018

Les amants de  l'estran  : pour Marie-Claude




Voir le monde autrement…

Cette force intérieure qui me vient du vécu, se heurte aux résistances nocives qu’il me faut contourner. Je veux parler des idées noires.
Il n’est pas question, au moment des installations land art d’exhumer de l’éparpillement des idées quelque ersatz sans saveur.
Représenter le monde avec ce que l’on a comme moyen, ce que l’on trouve et s’en tenir à ça, voilà ma conduite.
Appréhender avec mon corps, le vertige de la non-compréhension. Repartir avec une foule de questions qui se perdront dans le brouhaha du monde, suffit à me construire une espérance.
Les images représentées, ici,avant d’exister, se sont composées lentement : paysage, lieu ,eau, lumière, fleurs, pierres, sable, vent, comme un zoom, à l’envers qui amène les composants à la chambre noire.

Boîte à idées où se mêlent l’amour, la déraison, la colère, l’espoir, le silence. Un capharnaüm indescriptible.
Le temps se dilate. La main transmet, exécute, reprend, pose, hésite, traduit ma pensée.
Je quitte cette situation inconfortable et nécessaire à la création.
On voudrait tout dire en un geste. Il faut accepter ce manque, ces imperfections, ces scories de l’imaginaire.
Demain, je reprendrai la route kaléidoscopique, jusqu’à la rivière qui mène à la mer.

Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" les amants de l'estran " à Marie-Claude
Côte de nacre - Normandie - 2007

mardi 9 octobre 2018

Mémoires .     Pour Tilia




J'ai rejoint le silence...

Je ne sais pas si ce que je fais, se partage. Cela peut se partager mais pas avec tout le monde. Je ne crois pas. Certaines de mes urgences, sont si fortes, si personnelles, qu'une fois traduites, je crains l'overdose.
L'essentiel n'est pas dans le détail de chaque travail, il est bien dans l'inscription à long terme et dans cette envie de vivre ainsi, loin du tumulte.
J'ai rejoint le silence, mon silence. J'attends le prochain départ, avec le désir d'oublier tout ce que je sais du land art, tout ce que j'ai déjà fait ,avec l'intention de laisser la Nature me proposer, d'autres pistes, d'autres inspirations.
Probablement, je continuerai à vous montrer quelques unes de mes créations, si tout se passe bien. Je sens si souvent le courant d'air de la porte de sortie dans mon dos. Désormais, ce ne sera pas long.
Enfant, j'aimais l'école buissonnière. je n'ai pas beaucoup changé. La tentation est trop grande, pour rentrer dans le rang.
Roger Dautais
Notes de Land art pour la Route 75

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com

Photo : création de Roger Dautais
" Mémoires " . Rive gauche.
Pour Tilia , étoile du Chemin des Grands Jardins.
Caen - Normandie 2007


*


je manque de répartie ça c’est depuis
longtemps surtout quand le cœur fait un
boucan à l’intérieur c’est peut-être que les
mots ne sont pas à la bonne place il
faudrait les faire refroidir et moi mes
mots ils sont toujours un peu trop dedans
émus.

Albane Gelé

Extrait de Aucun silence bien sûr

lundi 8 octobre 2018

Cairn sur  l'estran  :  pour Marie


 Les mots sont dévastateurs.
Un mot vous sauve, un autre vous tue.
Amélie Nothomb.


J'ai affronté ma mémoire jusqu'au bout,ce matin d'automne.Tête vide, tel un rôdeur sous la lune, j'ai recherché une solution vers la mer. Elle monte vers moi, sans pitié. Mixture remontée des abers pour me sauver du reste. Je me serais assis en dehors de ma peau, sans ce viatique.
Par crainte d'étouffement, j'ai craché des cauchemars les plus noirs et suis descendu au pierrier.
La mer folle brassait les pierres à grand bruit. J'ai attendu que ce tintamarre me fasse tout oublier et abattre ce cairn comme on fait pour un chêne, en fin de vie.
Roger Dautais

Photo : création land art de Roger Dautais
" Derniers instants " pour Marie
Cairn sur l'estran.

http://marie-aupaysdesimagesetdesmots.blogspot.com/

*


Noyau central

Lorsque les mots parviennent à leur sommet
Ils ont déjà brûlé
Le texte s'écrit
Dans les ponces et les basaltes
Je ne sais rien e ce que je suis
Je ne connais que les scories
Où va le doigt sur le chemin des signes
Obstinée à la phrase
Puisatier du verbe
Je n'ai de lien qu'avec l'opaque

Consumée- c'est toi qui portes le feu.

Claude LOUIS-COMBET

"Petite géologie du cœur " in Le Petit Œuvre Poétique.

samedi 6 octobre 2018

Cairn en Bretagne  :  pour Océanique


Vie et mort d'un cairn...

J'ai toujours voulu voyager plus loin que ne promet une terre où je marche.
Enfant, atteindre l'horizon était peine perdue, mais, y accrocher mes rêves, me rendait curieux, me maintenant en vie.Un jour noir passait plus vite que son bruit. Dans les terres noires,chaque pierre remontée du fond, laboure les pièces de pâture, les plus ingrates.J'étais cette pierre. Suis-je en mon pays devenu étranger, quand l'identité se calcule en biens de toute sorte ? Que pèse une poignée d'ajoncs, une poignée de cupules, les dernières fleurs de buddleïa, les fruits d'une rosa, la grappe d'ampélopsis, ou la feuille de
figuier ?
L'eau s'enroule lascive autour des pierres moussues, du Loc'h. Plus au sud,
en bordure d'atlantique, de l'estran..elle lèche ,salée, les premiers sables de l'estran.
Nuits blanches entre Orion et Cassiopée. Blondeur des rêves, présents, blés lascifs, mèches rebelles.
Mes vertèbres ont tenu. Mes souffrances, aussi. Loin de sa parole, ma vie se déroule, silencieuse, transformée en nuit glacée. Les traces mnésiques engrangent l'histoire d'un vieil homme, quittant la terre, jour après jour.
Entre mes mains, celles qui vont chanter la vie, face à la mer et l'attente de pied ferme. Le cairn vit et attend la marée. Plus tard, en une seconde d'éternité, tout sera dit et projeté au sol.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" Cairn en Bretagne " pour Océanique
Carnac - Bretagne

*


L’homme prendra modèle sur la terre
La terre prendra modèle sur le ciel
Le ciel prendra modèle sur la Voie
La Voie, elle se modèle sur le naturel.

Lao Tseu – Tao te king

jeudi 4 octobre 2018

Les trois frères :  à Rick Forrestal


Le silence des pierres.

Des cris d'enfants jetés aux poubelles de l'oubli. C'était les miens. Dans le cimetière des amnésies, les tombes sont anonymes. Détestant rester entre quatre murs, je suis en fuite permanente des lieux clos.La mort frôlée, c’était tout ça à sept ans. Collée pour toujours, la malédiction du placard aux toiles d'araignées. Si tu n'as pas vécu enfermé, la figure aplatie sur la vitre de la fenêtre, à bout de souffle, tu ne sais rien.
Homme épi, j'ai poussé dans l'ornière, cabossé par les saisons lourdes. Souffrances niées jusqu'à la folie. Ces exploiteurs d'âme portaient soutane. La seule sortie possible, en finale, était l'école buissonnière puis la route qui menaient à l'immanence de la mer.
Frères aveugles et gavés, vous avez fermé les yeux, ignoré le drame.
J'aime le silence des pierres, mais aussi leur chant quand il s'élève, fraternel et pacifie l'histoire.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" Les trois frères "
Ile de Stuhan - Morbihan
Bretagne

mercredi 3 octobre 2018

Pierres d'oubli  :  à Youenn Gwernig
 
 
Le temps galope vers le "Miz du" ...


L'automne est au Nord. Un soleil pâle tente de réchauffer ma carcasse. Je sors de mon placard d'enfance. Les heures tranquilles se comptent sur les doigts d'une main.
Le temps galope vers le "Miz du ".
Je ne crois plus aux couleurs vives des feuilles, vivant leurs derniers instants dans les arbres. L'entropie est aussi en moi également. Pas d'indulgence dans le décompte. Je descends la pente. Au cœur des pierres se trouve le chant de la mer . Ici se posera la première pierre de mon oubli. Sauf que je vais aveuglément rejouer le geste de mon enfance et lever les yeux au ciel, désespérément vide.

Roger Dautais
Notes de land art pour la route 75

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : " Pierres d'oubli " Pour Youenn Gwernig
Locmariaquer - Bretagne


*


« Voilà maintenant suis fixée

J’ai l’âge où un gars défoncé

Dans un métro de nuit bondé

Éructe et me tend un billet

Pas du tout doux pas doux du tout

Un billet rose pourtant mais bouh

Billet de banque de dix euros –

C’est pour t’acheter une teinture –

Je n’ai pas compris tout de suite

N’ai pas saisi du premier coup

Le message en sa vacherie

Quand je suis sortie à l’air libre

La lune éclairait sans scrupules

Les gens les choses jusqu’aux racines ».
Valerie Rouzeau*

* https://www.franceculture.fr/personne/valerie-rouzeau

mardi 2 octobre 2018

Le  gardien du feu  :  à Charles Aznavour


à toi qui aimante ma vie...

Une solitude recherchée m'incite à suivre ce fleuve aimé, à l'accompagner en rive. Tous les matins du monde, rassemblés, dans ce croisement des vent matinaux, au-dessus de l'eau. Une route secrète me travaille et m'attire. Les roseaux voraces colonisent la rive gauche.
Un chapelet indéchiffrable, d'amnésie nostalgique, pend à ma ceinture. Toutes ces vies vécues, tous ces êtres croisés, oubliés, près de moi, surgissant sans prévenir.
Je préfère marcher seul, depuis la mort de Morgane. Je m'incorpore mieux à cette saignante multitude, absente. Je disparais aussi.
Ni légende, ni mythe, j'avance, marcheur impénitent, libre et vieillissant.
Dans ce chaos de vie, c'est toi que je réclame, femme aimée, toi qui aimante ma vie.
Ce pays sans toi serait trou noir.
J'ai hérité de toi,ce monde commun, sans partition autre que l'éclatement.
Il se peut que ma mémoire soit vide, mais pas de toi.
En secrète entente, j'élève pour toi, ce cairn, accompagné d'un feu de solitude.
Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

Photo : création land art de Roger Dautais
" Le gardien du feu " Pour Charles Aznavour
May sur Orne - Normandie



*


Le temps

Laisse-moi guider tes pas dans l'existence
Laisse-moi la chance de me faire aimer
Viens comme une enfant au creux de mon épaule
Laisse-moi le rôle de te faire oublier
Le temps qui va
Le temps qui sommeille
Le temps sans joie
Le temps des merveilles
Le temps d'un jour
Temps d'une seconde
Le temps qui court
Et celui qui gronde

{Refrain:}
Le temps, le temps
Le temps et rien d'autre
Le tien, le mien
Celui qu'on veut nôtre

Le temps passé
Celui qui va naître
Le temps d'aimer
Et de disparaître
Le temps des pleurs
Le temps de la chance

Charles Aznavour

Ecoutez- le chanter " Le temps " :
https://www.youtube.com/watch?v=_R-ldtG5Xjc

lundi 1 octobre 2018

Cairn majeur   :  pour Erin

Condamné à vie...

Toutes pareilles, ces pierres à vos yeux. Tous ces regards perdus qui les délaissent. Même le ciel passe au-dessus, sans s'arrêter. Venu jusqu'ici pour faire connaissance, à nouveau, je pose mon sac. Je les écoute, d'abord, reprenant le refrain du ressac, puis e laissant bercer près du trait de côte. Des vagues imprenables, petites et courtes, meurent à mes pieds. En mémoire, ici, d'effroyables tempêtes.
Mon enfance m'accompagne , avec ses jours étranges, si souvent noirs.
Mon besoin d'espace, vient de là. Le carreau d'une fenêtre de placard, suffit à gâcher un ciel bleu. Geôle d'enfance brutalisée et mémoires se mêlent.
Ma vue s'embue.
Condamné à vie, à suivre le hasard qui veut un chemin d'exode sous mes pieds. Je refuse tout hurlement. L'humain n'y est pas. L'ombre notoire des pins maritimes avale tous sévices, écume les poèmes édulcorés. Restent les coups, en mémoire, comme pluie drue.
J'échappe au pire, hoquetant, face à la mer. J'irai bien jusqu'à l'offrande d'un cairn pour un peu de répit dans cette vie qui s'achève.

Roger Dautais

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
http://rogerdautais.blogspot.com/

" Cairn majeur "
pour Erin
Ile de Saint-Cado
Morbihan - Bretagne


*


Offrande

C'est à venir entre les mots vieux grimoire
Ce qui se dit cerné de silence
Dans la nuit des feuilles

Le calme terrible du poème ici offert
L'ombre clairsemée de tes yeux
Dans un orbe blessé

Guy Allix *

Pour découvrir ou mieux connaître le frérot : 

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.