Ombres portées à Kerendeven : pour Anne Lemaître |
Passage secret à Kerguéarec : pour Isabelle Jacoby |
Hommage au Tumulus e Kercado : pour Serge Thébault |
Testament inachevé : à Guy Allix |
Saint Cado, côté jardin :pour Salome Guadalupe Ingelmo |
Silence rouge : pour Isabella Kramer |
Grand oblique de l'Île Saint Cado : pour Sadaya |
Quart de tour. Île St Cado : Pour Marie-Josée Christien |
Zénitude en Ria d'Etel : Fabienne Marsaudon |
Diablerie finale : |
Cairn à l'orange en Ria : Pour Alain Jégou |
Le passeur d'idées : à Claude Pélieu |
Boîte à légendes : to Erin |
Rythmes d'automne en Ria : pour Patrick Lucas |
A Marie-Claude, seulement...
Je ne suis pas en recherche d'une rédemption lumineuse mais j'aimerais au moins, finir ma vie en paix avec moi-même. Cela devrait pouvoir se faire, je vis déjà en bonne entente avec les morts ce qui n'est pas le cas de tout le monde. Et c'est ce que je me dis en cet après midi d'hier tout en longeant cette vaste clairière de Kérisper, qui descend vers la ria d'Auray avec une vue imprenable. Je me suis fait cette réflexion , non sans avoir noté que mes voisins de travail ont adopté la plus spirituelle des positions, en confiant leurs cendres, qui à un olivier, qui à un chêne ou un érable du Japon.
Que voulez vous, c'est la vie, une fois dedans, une fois un pied dans la tombe. On ne plaisante pas avec ces choses parce qu'un jour...alors autant s'entendre avec ses voisin du dessous. Je vais donc, répétant mes erreurs, perdre mon temps, comme me disait un voisin homme d'affaires qui n'a jamais une seconde à lui. Le pauvre !
Petit ennui passager, une vielle blessure à la jambe semble bien se réveiller et me valoir quelques vacances forcées. Le matériel s'use, comme me dirait si bien mon ami Serge.
Comme j'ai définitivement abandonné la course au titre, à la reconnaissance éternelle de mes proches, je vais ou mon imagination m'emporte et ce, depuis plusieurs jours, marchant le long de la Ria d'Auray, après avoir, fait le tour de l'Ile de Saint Cado, arpentant le Golfe du Morbihan du côté d'Arradon, rendant visite à Carnac et ses alignements, découvrant le Tumulus de Kercado. Bref, au total ça fait pas mal de chemin. Je ne vous raconte pas tout dans le détail. Trop long.
Lorsque j'arrive au bord de la ria, les berges sont inondées . Le sentier côtier a disparu sous les eaux ce qui donne au paysage un air de plénitude absolue. La mer est là, présente, bien au plein et je ne sais pas pourquoi, je pense immédiatement au poète disparu Alain Jégou. Pourquoi à lui et pas à un autre. Bien sûr, je ne suis pas en prise directe avec l'Océan. C'est pourtant lui? cet Océan Atlantique et personne d'autre qui fait naître ce clapot régulier le long des berges. Simple chanson de quelques notes pour me dire qu'il a compris le message et qu'il fera suivre pour Jégou. Ne pas se tromper de tempo. Le message sera un cairn,simple, élégant, solide, bien posé sur ses bases, regardant la mer et puis à côté, une orange posée là comme d'autres posent des bonbons ou de la nourriture sur une tombe.L'intention va jusqu'à ce détail.
Je me souviens soudain d'un mot reçu de Lu Pélieu, après mon hommage à Alain, "Breizh", ma première spirale en terre Bretonne. Alors, j'enchaîne les idées, Lu... Claude, le second cairn sera élevé pour Claude Pélieu. Ces deux là devraient bien s'entendre ici, au moins le temps d'une marée. Je m'y prends a plusieurs fois car, ça y est, je suis au ras du claquage, mais je termine mon geste en équilibre sur un pied. Ce qu'il ne faut pas faire pour aller au bout de ses idées. Je récupère en regardant ces deux cairns amis. J'aime aussi le land art pour ces instants. Ils n’appartiennent à personne si ce n'est au paysage mais ils sont chargés d'humanité. Le soleil fait une belle apparition et me donne la force, d'aller perdre un peu de temps dans une vielle barque échouée dont le bleu délavé m'inspire depuis longtemps. Je réalise une petite installation avec des baies fraîchement cueillies mais je crois que le plus admirable est fait par le soleil et ces ombres portées. Merci à lui. Le retour a été moins glorieux. J'ai trainé la patte dans ce bois en pente, et j'ai profité de la vue sur ce merveilleux cimetière paysager.
Pour le reste, bien sur la Ria d'Etel que je découvre simplement, où je commence à travailler, un peu, c'est un lieu d'une beauté rare dont les lumières m'ont déjà donné rendez-vous pour des prochaines fois. Le tour de L'Île Saint Cado,à marée basse m'a donné quelques occasions de cairns éphémères, et de belles rencontres avec des marcheurs.
Et pour terminer, quelques mots au sujet des installations Boite à Légendes et Rythme d'automne. Elles ont été réalisées le long de la Ria d'Auray et tous les composants ont été récupérés, ramassés, cueillis dans un rayon de 2 kilomètres. Par exemple, les morceaux de bois goudronnés ont d'abord servi à ostréiculteur pour fabriquer des supports immergés en eau de mer et servant à la culture des huitres. Trop usés, ils sont débités et j'imagine, brûlés. C'est eux qui m'ont servi de cadre. En dehors des heures passées à la cueillette, l'assemblage et la composition de chacune de ces installations m'a pris un peu plus de trois heures. J'aime à dire que je n'invente rien sinon ma vie et que c'est déjà une belle satisfaction. Bien sûr, je vais devoir m'arrêter encore pour cause de blessure mais cette fois, une dizaine de jours devrait suffire.
Je vais reprendre mes cartes d'état major sur les quelles je passe beaucoup de temps et imaginer mes prochaines sorties. Je montrerai bien quelques photos de land art à mon voisin, mais il n'a pas le temps, et d'ailleurs, ça lui donnerait peut-être des cauchemars. Alors j'attendrai encore un peu avant de lui en parler.Et puis, en matière de lecteurs, je n'ai pas à me plaindre, vous êts là, toujours plus nombreux. Merci à tous.
Roger Dautais
Galet
tu es la parole concrète
de la patience
bois flotté
une ponctuation
tesson de verre poli,
anchronisme,
grumeaux de mazout,
lettre macabre
à l'adresse d'un condamné
que la nature récite
d'un idéogramme éphémère
des algues sèches.
La plage sait
que tout arrive.
Louis Bertholom
Bréviaire de sel
Editions Sauvages 2013
Rituel
Quand le silence a peine à vivre
Ma voix soudaine se cabre
Dévalant mon corps en quète d'un lieu sûr
J'allume un grand brasier
A la mémoire des morts.
Guy Allix
Mouvance
Mes Mots
Editions Rougerie 1984
Un sommeil illusoire
agite et ronge
les efforts fragmentés
d'un temps secret.
Tout est posthume
depuis toujours.
Marie-Josée Christien
Les Extraits du temps.
Les Éditions Sauvages