En espoir de retour : à Patrick Lucas* |
Le point final : à Guy Allix |
Route 74. Le dernier jalon : à Serge Mathurin Thébault |
Déchirure blanche : pour Marie-Josée Christien |
Nés en mer : pour Erin |
De pierre et d'eau à Rossichka, Nadezda et Noushka, pour leur petite musique de l'âme. |
Liste noire à Lampedusa; : pour Mémoire de Silence |
Gémellité: pour Synnöve et Ruma |
Guetteur de marée : pour Joelma ( A.T.D.Judas) |
La longue marche : pour Bernard Moitessier |
Autrefois, l'Afrique : pour Christian cottard |
12 vie à Lampedusa : pour Fifi |
Le rappel : pour Pastelle |
L'insoumis de Saint Phil.: pour Anne Le Maître |
Palpitation rouge : pour Marie |
Pour toujours... : A Baboon, chien fidèle |
Trait-d'union : pour Rick Forrestal |
Un homme est riche de tout ce dont il peut se passer.
H.D.Thoreau
à Marie-Claude
Lundi
Suis-je vieux, maintenant, ou simplement un passager du temps, approchant du terme ?
Exister, demande la plus difficile des acceptations, celle de mourir à terme. Ai-je le droit de me laisser envahir par mes silences, jusqu'à l'ivresse ? Je le fais.
Mardi
Le calme de l'océan a disparu au moment de la renverse. Je l'ai constaté au remous de la première vague frappant l'estran. Brassage de galets, à vif. Je viens de terminer ma énième série sur l'exil, celle où je fais parler les pierres de la mémoire. Mémoire sacrifié des migrants de Lampedusa. Je connais la puissant vague d'oubli qui nous frappe l'esprit, après chaque tragédie. Perché sur un rocher, mes personnages vivent leur destin. Au fond de la Méditerranée, Nafy,Mohammed, Onnab, Hiba, Zanouba, Zayane, Zakia et des milliers d'autres que nous avons refusé. J'ai dressé des pierres jusqu'à user toutes mes forces pour dénoncer ce scandale.Ce ne sera jamais fini et d'autres doivent prendre le relai.
Mercredi,
J'ai rendu visite à Bernard Moitessier, en sa dernière demeure, au cimetière du Bono, au pied de son palmier.Il sut, en son temps, refuser les honneurs dus à son exploit de tour du monde en solitaire, a bord de son mythique Joshua. Il considérait que la liberté valait mieux qu'une breloque. Une fois passé la ligne d'arrivée en vainqueur, il continua sa route sans s'arrêter. Bel esprit de résistance aux trompettes de la renommée.Son livre de bord, La longue route, est un de mes livres de chevet préférés.Il m'accompagne sur ma route de land art
Jeudi
Silhouette d'outre Atlantique : Erin
Je ne l'ai jamais vue autrement qu'une ombre opalescente, une présence intimement liée au paysage, un regard posé entre passé et futur, mais nous sommes devenus amis.
Vendredi
Je suis emporté par le mouvement de l'existence humaine. Jours de disette où j'accomplis, malgré tout, mon destin. Les vagues frappent la côte de Kerpenhir, en cadence, drues, têtues, avec force. Je sens vibrer la roche sous mes pieds.Face au vent,je rejoins la vie qui se love dans ces petits instant de temps long. Je ne céderai ma place pour rien. Fabriquer des cairns, ici, est une belle gageure, mais les réussir, une grande joie. Il ne s'agit pas, ici, de chercher l'original, ou la flatterie vile mais l'épaisseur et la profondeur de ma vie qui me branche avec la nature.
Samedi
Je relève le col de ma veste de quart et lève les yeux au ciel. Je tente une ultime négociation : il pleut depuis 12 heures sans interruption, pourriez-vous chasser tous ces nuages, d'un seul coup de vent?
Les oies bernaches ont fini par décamper pour de bon.
Rien...Aucune réponse...Le ciel est toujours vide au-dessus de moi. Je reprends la marche sur le chemin douanier. L'embellie a fini par s'établir alors que je suis trempé jusqu'aux os et transi de froid. Ah qu'il me fait mal, ce premier pierrier. Je suis comme un enfant retrouvant son terrain de jeu. Je n'ai d'enfant que les yeux du rêve.../
Non, le land art ne se pratique pas dans un salon. Il est pour moi, le prix d'une vie.
Dimanche
Travailler sur un cairn en voie de disparition, c'est un peu faire mon auto-portrait.
En équilibre dans les falaises de Ty Bihan, à Carnac, je m'absente du monde gris; Le rêve permet cette absence salutaire qui, elle même, permet une vison de la nature, toute différente.Cette vision disparaît dès que le rêve s'interrompt.
Cette technique me fut donnée par mon ami, Peter Irnik, chaman Inuit de son état, lors de son voyage en France au Mémorial Canadien Juno Beach (Courseulles sur Mer) Normandie. Il était chargé de ramener les âmes indiennes, tombées au combat lors du débarquement de la seconde guerre mondiale, sur leurs terres amérindiennes, par la médiation d'un Inuksuk, construit par lui, en ma présence. Une telle rencontre marque une vie.
Sur la route du land art, je suis toujours en partance, sans idées préconçues. C'est cela, l'esprit de découverte.
Roger Dautais
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Ce texte clos la route 74. Je serai heureux de lire vos commentaires. Je pourrai le faire jusqu'au Jeudi 28 septembre, à midi. Je serais ensuite admis à l’hôpital puis opéré le lendemain. La période poste -opératoire sera difficile à vivre et je ne sais ni quand je reviendrai, ni dans quel état. Merci à vous de m'avoir soutenu de votre amitié. J'espère un jour, ouvrir la route 75, si je le peux. Je vous embrasse bien amicalement
Roger Dautais
***
/..." Nous voulions seulement rameuter
les aubes primitives
et capturer l’extase
de l'alouette
au fond du dé à coudre de nos pensées.)
Sylvie Brès
Tu les entailles
au diamant
tes mots
tu leur voudrais
tant d’éclat
mais les voilà qui saignent
et rien ne peut arrêter
cet épanchement.
Sylvie Brès 1954/2016
(Cœur troglodyte,Castor Astral, 2014)
*Patrick Lucas
Auteur, poète, photographe
"Terre d'asphalte"
E et D éditions Mai 2017
" Vraiment un rêve dans un monde bleu, serein, plein de beauté" ( Araceli, bloggeuse )