La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

lundi 17 février 2020

« Elévation » à la mémoire de Graeme Allwright.



A Marie-Claude
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ces « dits de vie ».
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C’est sur une plage de la Manche où j’avais vécu mon premier abandon, vécu comme tel. J’avais 5 ans. Après avoir joué sur le sable, avec mon, pendant quelques instants, mon père était parti, sans me dire où, ni pour combien de temps. J’étais paniqué.Il m’avait confié à la garde d’une tante, venue me récupérer plus tard. Trop sévère pour être aimée, entraînée par l’ambiance familiale, elle punissait et frappait aussi.
Cet arrachement authentique, était lié pour toujours, à l’image d’une plage déserte, au bord de la mer. La conscience tragique de cette inanité, s’était vitrifiés e dans mon cœur. Dans les années qui suivirent, je n’avais jamais accepté aucune raison qui puisse justifier la maltraitance d’un jeune enfant. Même si j’avais pardonné très tard dans ma vie d’homme, je n’avais jamais oublié.
Enfant blessé, je devenais imprévisible et mon côté sauvage se développait, qui habitait encore mon esprit de vieillard.
J’étais un fugitif, orphelin avant l’heure, mendiant de l’amour.J’avais déjà une âme enfeu, le suicide toujours à portée, pour échapper aux violences.
Tant d’accroc sur ma peau, préparaient de longues errances mélancoliques où rien ne paraissait être viable. Mon sang noir parlait sans cesse. La mélopée circassienne se faisait, enjôleuse. Dans la rue des amours enfantines, quelques moments de tendresses complices, dans le ruisseau, entre les averses de coups sur mon corps d’enfant, m’avaient fait croire qu’un jour, cela cesserait.
Chiens perdus sans colliers, graine de rue en galoches à semelles de bois, nous inventions une loi de meute dans les gravats des destructions de guerre. On y jouait encore, aux soldats à fusils de bois, lorsque, revenant des camps, rescapés, les nôtres, plus zombies que rebelles.
La belle société des vainqueurs, tous héros, se gavait, s’enrichissait, profitant de tout.
Affamés, , nous étions de la graine de voleurs, pour manger. Jours funestes de ma jeunesse qui plombaient encore l’ombre de mémoire.Tant de cadavres entassés, tant de disparus sans raison que j’allais bientôt rejoindre, suivant la loi de l’entropie.
Vers 1995, je rompais les amarres d’une vie de douleurs, prête à me laminer. Je commençais à parler de tout cela, non par écrit, mais dans le silence du land art. Tout pouvait être abordé par thèmes qui s’empilaient en strates de l’inconscient.Le mugissement permettait des affleurements de l’âme. J’osais, aller plus loin de ce qui m’avait été interdit. L’association libre de mes idées, ouvrait des portes à l’infini. Rien ne m’avait quitté de cette peine profonde que certains relevaient en me lisant. Et l’image d’un monde indifférent à la pauvreté, à la misère, au profit des dominants, m’inquiétait toujours autant.
Aujourd’hui, en Grèce, existait, organisé par la communauté européenne, le plus grand
camp concentrationnaire, d’Europe, où des migrants, mouraient, dans des conditions insoutenables, sans beaucoup de considération humaine
Autre abandon humain, à grande échelle, d’un peuple au détriment d’un autre peuple
Quitterais-je cette terre sans avoir changé grand-chose à ce chaos qui me blesse ? Au moins, aurais-je essayé d’adoucir ce monde, à mon niveau, développant un don offert, par la pratique et le partage du land art. Ma façon personnelle de remercier aussi , la nature.
Le 16 février 2020, j’étais vraiment triste, lorsque dans la soirée, mon fils m’apprit la mort de Graeme Alwright.
Roger Dautais.
Photo : création land art de Roger Dautais
« Elévation » à la mémoire de Graeme Allwright.
Côte de Nacre - Normandie

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.