Cairn de la cabane du silence : pour Maria, seulement |
Pour Erin, seulement,
car elle comprendra cette histoire écrite pour elle.
Il fait toujours trop beau après les catastrophes
Depuis la dernière tempête, ils avaient fermé la seule voie ferrée capable de desservir, les coins les plus reculés du pays, où je trouvais matière à land art. A pied, en longeant la voie ferré, c'était quand même, dix kilomètres et sur la ballast, ça devenait vite un enfer. En empruntant quelques chemins de traverse, ça se faisait.
J'avais toujours aimé Woodie Guthrie sa voix nasillarde, ses histoires de trains,de hobos et des marées prises en rade, qu'il trimballait sans son sac à dos.
Voilà pourquoi, je suivais les rails.Je m'appuyais donc cette distance, rencontrant sur le parcours, des morceaux de ciel bleu, tombés dans des flaques d'eau.
Il fait toujours trop beau après les catastrophes, mais on arrive par ne plus y croire. C'est la même chose avec les histoires d'amour.
J'avais réussi à rejoindre la Cabane des Silences, non loin de la tombe de l'ange.
J'avais retrouvé la cafetière posée sur la cuisinière à bois et le tablier jaune de mon amie, pendu à une patère.
Elle s'appelait Maria.
Maria aimait bien, cette cabane abandonné, eu peu en ruines, il faut le dire. Elle lui ressemblait, trainant quelques addictions qui lui rongeaient le cerveau.
Elle aimait aussi battre le bitume avec son chien errant qu'elle appelait " mon bâtard d'amour ".
Marie "faisait "la tournée des bars de nuit, jusqu'à plus soif et c'est là que je l'avais trouvée, en fin de courses, avant de finir dans son lit.
Nous avions fini par nous entendre, même si je laissais les portes de placard ouvertes, dans sa cuisine et mes chaussures trainer dans sa maison.
Un jour, je l'avais emmené au bord de l'eau et appris qu'un cairn n'était pas qu'un tas de cailloux, comme disaient les ploucs du coin.
Non pas, un objet quelconque, de forme bizarre et de destruction du paysage, mais bien un trait d'union entre elle et moi, entre nous et le ciel. Ça lui plaisait bien à Marie. Elle disait que c'était comme mon sexe, un trait-d'union entre elle et moi.
ça me plaisait aussi d'élever des sexes en Ria.
Des filles comme Maria, ça ne sait pas vivre longtemps. Trop à fond dans le carburant. Son cœur avait cédé.
J'étais le seul au crématorium. Tu sais les hommes, c'est souvent comme ça, ils profitent de la bonne occase, remettent leur froc et s'en vont.
J'ai récupéré son urne et je suis allé répandre ces cendres,au jusant, du côté du Bono, où les eaux du Sal, rejoignent la mer.
A chaque marée, je la vois passer, Marie, en compagnie des Bernaches et je chante pour elle.
Roger Dautais
LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
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Cairn de la cabane du silence : pour Maria, seulement
Bretagne sud -2014