La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

mardi 21 mai 2019

Le temps qui passe :  pour Patricia Anisten

Recueillement  : Pour Edith et Maud

Yoni  : aux passantes sans soucis

L'instant  :  pour Thierry Kergroas

Répétition générale  : aux porteurs.


 à ceux qui doutent.





Répétition générale



Si le land art est bien celui de la rupture avec la tradition, d’un autre côté, il cultive un lien intime avec la nature. D’où cette ambiguïté qui m’est parfois reproché. J’assume mes contradictions, tous les jours, ne cherchant plus à être catalogué dans un genre artistique bien défini.
L’idéal, pour avoir une paix intérieure serait de s se sentir jeune, dans cette pratique à risques, une fois le grand âge venu. Ce qui est mon cas.
Si ce n’est pas un problème pour moi, de risquer ma vie, comme je l’ai toujours fait, ce l’est pour mon entourage qui m’appelle à plus de sagesse et me tire,ainsi vers le bas.
Si je dors peu, c’est pour m’accorder une seconde vie, quand je suis en train de perdre la première. Mon éveil tient à cette culture de de l’usure et de la fatigue. J’y puise ce monde imaginaire, à qui je tiens depuis toujours.
J’aime prendre le large de mon savoir,j’aime oublier, volontairement ou pas. C’est dans cette perte aussi, que je trouve mon inspiration Perte géographique, perte sentimentale, perte physique., ma fin de vie d’artiste est kaléidoscopique.
Retrouver l’innocence des jeux de mon enfance, en fabricant un moulin à aube dans un ruisseau,
et inconsciemment retrouver une scène mille fois répétée entre cousins, dans la forêt de Brocéliande, c’est ouvrir la porte au rêve dont j’ai besoin, pour oublier mes souffrances physiques qui plombent ma vie depuis trop longtemps.
J’en suis rendu au point de solitude, qui m’isole et fait de moi un étranger dans mon propre pays. Cela me permet de mettre en place, un grste d’adieu, une trace d’au revoir dans chaque création.
Je ne pense pas que l’art soit un moyen de me sauver, car je courre à ma perte, depuis trop longtemps.Mais il reste un moyen de survivre provisoirement, et celui de suivre le chemin qui est le mien,désespérément, sans but.
Cette errance me plaît, me fait exister, impatient de savoir combien de temps il me reste, mais aussi, satisfait de l’ignorer. 

Roger Dautais

Notes de land art pour la Route 77
pour LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS

lundi 20 mai 2019

Sauver  l'amour  :  pour elle.
Frontière  :  pour Edgar Hilsenrath
L'instant d'ici  :  pour Marie
Sérénité   :  à la rivière du Sal

Aux vies brisées d'Edith et Maud



Certains humains sont plus doués que d’autres. Certains sont faits pour accomplir. D’autres pour détruire. D’autres pour sauver. Mais la plupart des humains ne sont pas faits pour quoi que ce soit. Ils sont là, beaux et inutiles comme des anachronismes. Comme des cheveux sur la tête d’un caillou
 ThomasVINAU
Ici, ça va.



 à Odile

La nuit d’avant le jour.

Le vent froissait les eaux dormantes, dans les mares, déplaçait les feuilles mortes, en tourbillon bruyant et gênait le vol des corbeaux.
Il faisait plein jour, maintenant. Je n’avais pas de regrets d’avoir quitté la maison, au milieu de la nuit. Malgré  une soirée arrosée, je n’avais pas pu conclure de contrat sérieux avec mon nouvel éditeur,  certes, flatteur mais trop cupide, pour me décider.
 Insomniaque, je ressassais ce rendez-vous de trop, et voulais à tout prix m’éloigner de toutes ces péripéties. Il avait tellement insisté sur mon âge que cela avait fini par me déranger. Je savais bien qu’il me fallait aller jusqu’au bout de ma vie d’artiste et conclure pour  faire éditer  un dernier livre, mais pas à ce prix. Et puis,  un  livre de  plus,  à quoi bon.Cette marche de nuit me faisait du bien, même si elle s’avérait dangereuse sur la route qui menait à la côté. Très vite, je l’avais quittée pour m’enfoncer dans la campagne et retrouver mes chemins de traverse.

Cette nuit glacée avait fini par accoucher d’une aube blanche sous la pleine lune. Dans l’herbe gelée, s’inscrivait une géographie de pistes animalières, se dirigeant toutes dans le même sens.
Des cercles magnétiques et inaudibles, s’échappaient de l’astre, remplissant mon âme en demande.
Je rêvais d’abandon, de dépouillement, de dépassement de soi, au milieu de cette nature généreuse, loin des foules bruissantes.
Un camp de manouches, rentrait en terre d’oubli. Les herbes se chargeaient très bien d’effacer leurs traces . Belle hystérie du manque qui fait suite à la vie lorsque celle-ci a disparu..
J’aimais ce peuple de voyageurs, parents de mes propres enfants, qui prenaient de la distance avec ce monde de consommateurs compulsifs et de propriétaires fixes, déjà morts en lotissement.
Ô terre, cruellement retrouvée par ce froid mordant, tu restais, pour le moment mon unique lieu de vie. Plus la marche avançait dans le temps, plus mon cœur s’emplissait de ton mystère. A chaque pas, chaque regard, mes sens s’ouvraient à cette vie sauvage.
Tant de souffrances tapies sous les feuilles en hiver ne comptaient plus. J'avais vécu les  mêmes dans  l'indifférence totale de mon entourage. Entrer en hiver emboîtait le pas de l’entropie et de la mort. Ma saison  préférée, celle au cœur de la quelle j'étais né, pauvre et   ma  place.
Chaque arbre devait se battre, ici pour conserver intacte, un peu de sève jusqu’aux futurs beaux jours. Chaque chêne, chaque aulne, chaque châtaigner, me confiait ce secret : résister, malgré le froid.
Avant de mourir, je connaîtrai, encore quelques printemps.
 De quoi réconforter ma solitude dans une continuation du geste land art, dans l’échange humain «  de cœur à cœur » de la pratique du pardon quand il le faudrait et tacher de quitter pour toujours mes cavernes neurasthéniques .

Roger Dautais
  Notes de land art  pour la Route 77

Au Cadoudal - Auray  Mai 2019


dimanche 19 mai 2019

Souhaits chamaniques : pour Ariane Callot
Le terminus  :  pour Tilia
L'autre frère, disparu  : pour Manouche
Le frère  : pour Ana Minguez Corella
Avant le blanc-manger   :  pour Maria Cano



 Je hasarde une explication : écrire
c'est le dernier recours quand on a
trahi
Jean Genet





 à Marie-Claude...

L’étranger
Je passais sans m’ attarder devant ces lieux de sortilèges que tu m’avais indiqués, il y avait bien longtemps. J’avais envie de retrouver ces ruines de ferme, où je pourrai pratiquer le land art, librement. Mon regard parcouru, une dernière fois ces sources, moussues, sans trop y croire. Pourtant, à cet endroit même, mon cœur s’emballait. Et si ton pouvoir magnétique avait été vrai ?
On avait bien trouvé le jeune fils de Pierre, noyé dans la seconde source, celle qui sortait d’une souche de chêne . La tête dans l’eau. Oui.
Je descendis la ravine avec cette mauvais image de l’enfant bleu.. Je devais franchir le ruisseau pour quitte cette zone et m’avancer à découvert jusqu’aux premiers bâtiments de ferme, tombés en ruine.. Une ferme abandonnée depuis si longtemps qu’ils avouaient leur peine de se présenter dans un tel état d’abandon.
Pourtant, j’aimais ce lieu calme, loin des sources à sortilège, loin de tes pouvoirs obscurs, de tes incantations, où je pouvais m’exprimer en toute liberté.
Un temps pareil aurait du me dégoûter de tout. Ma pratique du land art m’avait, justement habitué à sortir quelle que soit la météo. Et j’insistais souvent à prendre la route, sous la pluie, ,bravant le mauvais temps.
Alors, je rêvais du temps, où, dans les Alpes, je te lavais tes longs cheveux dans les abreuvoirs abandonnés par les troupeaux de moutons. Je pensais à cette chaleur intense qui desséchait nos corps en sueur. Nous acceptions ces contraintes sans rien dire. Mais ici, dans ce froid humide, j’avais pris l’initiative d’allumer un feu de solitude, dans la cour de la ferme. Pour le moral, vous comprenez. Aussitôt, des gens cachés, s’étaient joints à moi, dans leurs suaires, pour réchauffer leur âmes en peine. Braves disparus.
Il fallait bien ça afin d’ oublier les sources, me remettre en chemin, et trouver en mon cœur, le premier battement créateur.
Cela devait être amusant pour ces disparus, de voir un vieil homme, perdu dans ces ruines, un peu voûté, recevoir la lumière qu’il recherchait, jusqu’à le transformer en créateur.
Le temps hésita, dans ce froid perçant.
Pourtant, je persistais à tenir bon. Le land art salvateur, s’annonçait comme possible, ici.
Je me souvins de mon sentiment d’alors. Et si c’était mon dernier jour sur cette terre? Et si c’était un adieu définitif au monde dans ce lieu de solitude ?
Je peux bien le dire maintenant, je m’en foutait un peu de plier bagage, ici ou ailleurs. J’estimais avoir tout dit, tout fait, tout écrit, sans avoir besoin d’ajouter une autre œuvre éphémère que personne ne verrait.
Et puis, j’avais pensé que faire encore l’amour avec toi, aurait été le seul souvenir valable à emporter dans l’au-delà.
Dans ce pays paumé, inculte, fait de cailloutis , de ruines et de ronces,, encore présentes en hiver, et de beaucoup d’oubli, rien ne m’obligeait à vivre plus longtemps. Mais je l’ai fait.
Je me suis mis à l’œuvre,avec mes doigts gelés,et j’ai pratiqué le land art en pensant à toi.
A toi, l’absente maladive et je n’ai rien trouvé d’autre à rapporter en descendant vers le village, qu’une mélancolie poisseuse.
Je ne suis ,jamais retourné là-haut. Je n’ai jamais revu les sources. Jamais pensé à l’enfant bleu.
Je ne suis jamais retourné chez toi, ni chez personne d’alentour ayant connu cette histoire. 

J’ai tout donné au land art. Ça s’est fait comme ça, années après années , puis je suis devenu un étranger.
Roger Dautais
Pour LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
Au Café Latté...Auray Mai 2019



***




Toute une vie

peut parfois tenir

dans le passage

du crépuscule

à l'aube.
 
Marie-Josée Christien

Quand la nuit voit le  jour
Babelio28 mars 2016

samedi 18 mai 2019

La source  :  pour Jacqueline

 Géométrie : Pour Marty


Street art * :  pour Sophie

Cairn  blanc  :  pour Marie-Claude
 
A la cabane des silences
mes pensées s’envolent.



à Marie-Claude, femme aimée...

Au sommet de l’île, un vent de sud m’amène les premiers embruns. Le temps va changer avec la bascule de la marée. Tu me manques déjà.
Commencer par éteindre toute parole intérieure, puis celles qui viennent de l’océan. Écarter le murmure des premières vagues qui atteignent le pierrier bouillant. Aborder la descente de la petite falaise sud, sans bruit.. Retenir tes derniers mots «  mon cœur est dans ton cœur » comme si c’était ton  ultime  pensée. En faire un sésame pour l’instant présent.
Je voudrais voir la réalité nue de l’océan, d’ici à l’horizon, sans un nuage et faire de Stuhan, un sanctuaire pour mon cœur blessé.
Je voudrais compter les étoiles en plein jour et la danse sacrée d’Alpha de Céphae, pour toi, endormie, au milieu de tes songes.
Je voudrais que ton silence ne soit plus ce vide à remplir qui m’inquiète, mais une complicité à respecter, sous le glissement des sternes, au-dessus de nos têtes.
Ferme les yeux et donne moi la main. Tu vois ce qui ne nous regarde pas? Laisse-le de côté, laisse ton cœur parler et je t ‘élèverai un cairn, pour toi seule, face au large, avant la marée haute.

Roger Dautais

Notes de land art pour la route 77

pour LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS

 * Je pratique le street art, depuis de  nombreuses années, sans d'ailleurs en garder trace. J'utilise différentes techniques, pochoir,  lettrage, tags, fresque, collage de mes  propres dessins. Celui  présenté a été réalisé sur  un mur de maison de Caen, en ruine, en partant d'un tag existant,sur lequel j'ai rajouté un dessin fait avec  un morceau de charbon de  bois, trouvé  dans  un foyer éteint. Ce sont pour moi des  moments récréatifs sans prétention.



Une année de silences
« En toute vie le silence dit Dieu
Tout ce qu’il est tressaille d’être à lui !
Pas un seul mot, et pourtant c’est son nom
Que tout secrète, te presse de chanter… »
Patrice de La Tour du Pin

vendredi 17 mai 2019

Première sur  l'estran  :  Pour Ruma
Le voyage de la sphère  :  pour Océane J.
Intentions chamaniques  :  à l’esprit de  Morgane

Rendez-vous au marais :  pour Sophie ( Pastelle)
 

 Le travail est  l'amour, rendu visible
Khalil Gibran
Le  Prophète



 à celles et ceux que j'aime...

Je vis avec mes morts.Mon imagination m'emporte avec eux. J'ai tellement envie d'enchanter ce monde gris, que parfois, je me laisse prendre au jeu de cette transformation inévitable que me  procure ma compagnie.
Avec ce jour de soleil, comme une trêve au milieu de ce  mois interminable, je n'ai réalisé que la moitié de mon projet. Je dois, maintenant, travailler à l'intérieur des terres.
Le lendemain matin est gris, plombé, avec un ciel qui traine par terre. Mes chaussures de marche sont encore mouillées et pleines de sable.Je me dirige vers un marais de la région. On y accède par une longue piste de terre battue qui traverse des terres ensemencées de blé et d'orge. Voilà bien longtemps que le remembrement a rasé toutes les haies. Le vent est au nord Ouest et rien ne l'arrête. Au-dessus de moi, un vol de corbeaux joue avec ces courants d'air, s'envole, se pose, avec facilité. Je suis plus lourd qu'eux et mes pieds collent à la piste. Le paysage est sinistre. J'arrive à la zone marécageuse et je pénètre dans le sous-bois qui la couvre. La petite rivière est à 100 mètres de l'orée. Ce sous bois est un piège. A peine ai-je fait 20 mètres que mes pieds s'enfoncent jusqu'aux chevilles dans un sol gorgé d'eau. Le pluies des derniers jours ont fait monter le niveau d'eau de la rivière et le sol spongieux, s'est gorgé d'eau par capillarité. Bain de pied obligatoire, dans l'eau  froide.
Je dois rejoindre la zone des arbres moussus et progresser encore. Je marche sur les branches mortes, les souches, et les terrains plus durs. J’arrive à la rivière. Je réalise trois petites étoiles de fougère, que j'ai le plus grand mal à installer, perché, à genoux, sur un tronc d'arbre et manque tomber à l'eau plusieurs fois.
Je vais ensuite fabriquer  une flottaison en carré,  posée sur  une eau bleue, qui donne l’impression de beau temps.
Je quitte le bord du cours d'eau, et reviens vers le centre du bois. Je navigue entre les arbres moussus et cherche une idée pour symboliser les douze mois de l'année écoulée. Ce sera un ensemble de douze petites sphères de mousses posées en équilibre sur un arbre abattu par la dernière tempête.
Dans la carrière voisine, plane l'esprit de Morgane, chienne fidèle. J'élève un petit autel    pour célébrer son esprit qui s'élève au-dessus du bûcher . Elle me manque.
J'ai réalisé mon objectif, un jour avec soleil, un autre sans, m'auront guidés dans les choix des lieux.

Roger Dautais
Notes de land art  pour la Route 77 
LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS


Quand  on a
Pensé
rêvé, défriché
labouré, semé
arrosé, biné, récolté
moulu, pétri, partagé, fêté...

Prendre le temps de s'arrêter.

Robert Coudray *

*

https://www.youtube.com/watch?v=Q-YQa-N9BoI

jeudi 16 mai 2019

Le signe de  l'Oetre  à Guy Allix
La disparition  :  à Raymond Anisten
Âmes jumelles : Baradoz

Le lien- Passion  :  à Marie-Claude



Chaque tournant torpide de ce 
monde engendre des enfants
déshérités, auxquels rien de ce qui
a été,  ni de ce qui sera,  n’appartient.
Rilke



L'avenir, est ce qu'il me reste à vivre...

Lorsque l'indescriptible s'empare de toi, alors, tu te mets à vivre entre les  lignes, entre les notes,sous l'épaisseur des  mots. Tu ne t'appartiens plus. Tes mains fébriles, traduisent  une pensée, toute en vibrations. Il faut bien admettre que la création te dépasse.
C'est un peu le secret de ma vie actuelle.
Je me situe dans  une zone de non-savoir, nouvellement atteinte, immense et minuscule  à la fois. La seule source de  mon inspiration se trouve dans mon cœur. Tu vois  pourquoi, je quitte la route parfois et disparais de la circulation? Je sens en  moi,cette proximité de la mort, qui ne demande aucune consolation, et qui permet de vivre, sans  luxe,  près du dénuement, afin d'établir des communications de cœur  à cœur.
Je cultive cette sensibilité excessive, qui  m'amène  à  l'émotion  ultime.Cela m'importe  peu, aujourd'hui que l'on  me reproche tout ça. ? Je suis  plus que jamais, seul, étranger.
J'aime cette faiblesse  physique, de convalescent, qui a tout  mis a  plat, permettant  une reconstruction de mes émotions en les poussant  à l'extrême. Chaque minute s'abat sur  moi, comme étant la dernière et ma mémoire efface  mon passé douloureux, abandonné dans les hopitaux.
J'avance,  pieds nus, sur mon chemin de vie,espérant quelque lumière nouvelle pour éclairer mon ignorance. J'aimerai qu'elle soit capable de  m'amener  là,  où j'aimerai  mourir vivant.

Quand l'immobilité apparente des eaux dormantes dégage  une énergie réelle, le contact entre les deux  mondes, celui des vivants, celui des  morts s'incarne dans la moindre ridule née du vent. Les intersignes ont la parole.Il suffit d'y croire et la magie de toute  installation, flottante, apparaît dans la seconde.
L'histoire de chaque vie se termine par  une seconde d'éternité, pas  plus;

Roger Dautais
Notes de land art  pour la Route 77
Tous les  land art  présentés  ont été réalisés en Normandie,
 depuis 1997

mardi 14 mai 2019

Semis :  pour Thérèse
Fulgurance  :  pour Alfonso
Classement sans suite  :  pour Christine Saint-Géeours
Sémiotique  : pour Manouche



Aux Anges du Grand Garage Blanc.



Chambre 64
La nuit sera longue. Mon voisin de chambre est en urgence cardiaque et  respiratoire, il étouffe. J’appelle l’infirmier de garde. Ils interviennent à deux, rapidement. Plusieurs alertes dans la nuit, suivies de plusieurs interventions des soignants. Il délire, il crie.
 Je suis très souffrant, aussi, depuis  mon opération à cœur ouvert.. Distribution de morphine, trois fois cette nuit. J’allume ma veilleuse. Je ne dormirai pas. Je prends des notes, pour plus tard, avec l’idée d’un avenir compromis.
Service des soins intensifs -Cardiologie .
CH.Chubert Vannes



***


Petite musique de nuit

Le temps m’échappe, en suis-je responsable ? Suis-je plus responsable de cette force intérieure,de cette énergie, née d’un cœur abîmé qui se bat.
D’où viennent tous ces signes perçus, que je transforme en land art ? A qui s’adressent-t-ils, sinon à moi ? Je suis bien dans la dernière ligne droite. Je sais maintenant, qui aura le dernier mot.Souffrir est une injustice faite à la vie.
A quel âge devient-ton vieux pour aimer ? Parfois, dès l’enfance quand celle-ci est piétinée.
*
Souvenirs d'été...
J'avais 14 ans,. Elle aussi. Un premier rendez-vous, sous les marronniers des remparts de Dinan. Et ce banc de bois, pour nous, tous seuls, puis ce premier baiser advenu à la fin de l’été 56. Enfants, on découvrait l’amour.
*
Avant la mort, les séparations, les retrouvailles, les fâcheries, les histoires d’amour inattendues et l’esprit qui remonte le temps pour gagner quoi, en fin de compte,
*
Chaque année, un nom rayé parmi les personnes aimées, et puis un jour,vient celui de passer ton tour. Tu deviens «  le rayé de l’année « .
*
Entre le souvenir de ton visage aperçu dans un délire, et la solitude de l’après, une longue plaine où rien ne s’arrêter, rien ne se passe si ce n’est une longue mélancolie,tenace et sans fin


***
Notes pour plus tard

Note°1
Il est déjà bien tard. Une fois mort, le temps perdu le sera, définitivement.

Note 2
S’écarter de ce qui est évident, normal, prévu, attendu, et prendre le risque de se perdre dans l’inconnu.

Note°3
Est-ce grave, si je n’ai rien écrit d’important, aujourd’hui ?

Note n°4
Comprendre l’horizon avant qu’il ne bascule.
Il faut choisir entre la mort et la création. Parfois, c’est la mort qui choisit d’enterrer la création.

Note n°5
Rien

Note n° 6
Pendant mes absences, je m’éloignais de la terre entre morphine et perfs.
Et pendant ce temps, l’herbe avait continué à pousser sans moi. Chez toi, aussi.

Note n° 7
Au cœur de la nuit, je crie ma désespérance dans cette douleur qui me poursuit. Un seul désir, mourir, ou bien alors, de la morphine et que finisse ce manège où je n’ai pas le droit de monter.
J’aimerais aimer, plus tard, quand la vie sera plus fréquentable. Mon présent est détestable. L’illusion antalgique ne tient jamais sa promesse, longtemps.

ROGER DAUTAIS
 pour 
LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS
Avril 19
Dans ce mois, j'aurais été opéré  à Rennes-Pontchaillou et transféré au CH de Vannes. Au bout de 4 jours de ranimation, j'ai commencé  à prendre des notes, sous morphine.

lundi 13 mai 2019

Ombre et lumière  : à Guy Allix
Spirale en  lumière  :  pour Liplatus
Hommage  :  pour Anne, Claude et Joseph Fraiberger ( + 16.O8.44)
Cercles  pour  poètes disparus  : pour Odile et Jacqueline


 Suis ta vocation  les  yeux  grands ouverts. 
De nombreuses  professions exigent les sacrifices
 des  nuits blanches,  pour la vie

 Edith Boukeu




Nuit blanche et de dérive

Au fond, ma légende s‘écrit au jour le jour, sans que je ne n’aie à m’en occuper. Ce sera plus ou moins juste, bien entendu. Ce qui compte vraiment, c’est d’être attentif au chant du monde qui nous est donné, de l’entendre, d’y participer et non de vivre en courant.
La voie est étroite qui me permet d’avancer, dans ma vieillesse, entre une mort certaine et l’indifférence bourgeoise, qui vote pour une éternité immédiate.
Il faut , probablement avoir été humilié par ces dominateurs, pour accéder enfin à la liberté.
Liberté d’être, de penser, d’aller, de faire ou ne pas faire, et de laiser de côté, beaux discours, dogmes et autres embobinages.
Le land art est mon médium, mon trait-d’union, mon engagement, mon lieu de vie, mon
expression.
Je n’aimerais pas tomber dans le travers qui consisterait à intellectualiser, ce qui n’est qu’une expression manuelle.
Le cœur commande et cherche à recevoir cette onde née d’un autre cœur, sensible à mon travail.
Cela peut s’arrêter là, dans ma vie de coureur d’estran, sans rechercher plus de confort de vie, sans accumulation de richesses matérielles, avec l’idée d’une vie consacrée à l’art, sans but particulier et ne demander rien d’autre que d’être en progression sur le chemin de la connaissance et de la sagesse.
Il est inutile, approchant de la conclusion de ma vie, de me faire la morale, de m’apprendre  à vivre, ou de me récupérer dans votre société de l’avoir.
 L’aisance proclamée me crispe.
 L’obsolescence programmée de notre société de consommation, n’arrête en rien la création de surabondance de biens, réservée aux plus riches ;. Notre société, fait l’impasse sur la pauvreté, la vieillesse, la maladie, l’expression artistique. Il m’appartient aussi de condamner ce choix et de m’engager dans cette voie étroite où il faut résister pour vivre,  loin des foules en acquiescement permanent..
Le land art m’aide à dans cette douloureuse et dernière partie de ma vie d’artiste. Je suis venu sur terre  pour réaliser certaines choses et je tiens  à le faire,jusqu'au bout.
Roger Dautais
Notes de land art pour la Route 77



Grand Garage Blanc.

 Rythmes circadiens.

Cercle n°1
Mon land art ? Des lambeaux de vie, sans retenue. Un goût d’inachevé, parfois, recherché jusqu’à la mise en danger.

Cercle n° 2
La désespérance ? Elle m’a été offerte dans ma prime jeunesse. Ma mémoire a fait le reste ;
Dans notre monde individualiste, l’indifférence est une arme qui rejoint le mépris de classe. Il me faut vivre dans ce vide organisé, ce no man’s land de l’âme.

Cercle n°3
Est-ce grave si je n’ai rien fait d’important, aujourd’hui en land art ?
Il faut savoir aussi,s’écarter de ce qui est évident, normal, prévu. Il faut attendre dans ce vide et prendre le risque de se perdre dans l’inconnu.

Cercle n°4
Comprendre l’horizon, avant qu’il ne bascule.

Cercle n°5
Néant.

Cercle N°6
Il faut choisir entre la mort et la création. Parfois,c’est la mort qui choisit d’enterrer la création.

Cercle N°7
Pendant mes absences, je m’éloignais de la terre, entre exsanguination ,morphine et perfusions. Pendant ce temps ce temps, l’herbe continuait à pousser sans moi. Une vraie consolation, à mon retour.

Roger Dautais.

Nuit blanche sous morphine.
Service ce chirurgie cardiaque
CHU Rennes-Ponchaillou.
Avril 2019



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Qui êtes-vous ?

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.