La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

vendredi 3 février 2012












à Marie-Claude




Demain, je t'offrirai le Printemps...



L'horizon meurtri hésite à terminer son heure. Il peine, regimbe, se tord, s'étire et capitule devant la nuit. Ici, dans un dernier combat nait en silence le nœud coulant qui assassinera le jour.
Ailleurs, les tadornes tentent de réchauffer une nuit annoncée, incontournable. L'eau refuse tout compromis, frime puis finit par leur tendre son ventre saumâtre.

Le premiers genêts éclosent, je les ai vus. Ils me parlent d'une vie d'exil, la mienne, comme d'une trahison pointée et dénoncée, loin de mes origines. La Bretagne m'envoie ses intersignes. Je mourrai loin d'elle.
La mer cogne la falaise. Le trait de côte recule et les terres à blé s'effondrent sans le moindre témoin. L'estran brûle sous le sel sans témoin.Les hors dansent la sarabande en haillons et loin des chamans, piétinent les blés sans pitié. J'entends sortir de leurs bouches édentées des vers du Barzaz Breiz. Sur les hauteurs, quelques revenants haranguent la mer et la montrent du doigts.
Tout ici, est à recommencer à chaque marée. Le moindre cairn ne tiendra pas tête aux vagues.
Il n'y a rien à sauver de mes gestes, rien à retenir en mémoire. Se tordre de douleur, oublier la peine, parler aux vents, tout est vain qui ressemble à un échec perpétué.
L'hiver claque son dernier sous percé. Mes poches retournées lâchent une poignée de pierres. Dérisoire trésor rendu au paysage. Les rêves d'été sont vains. Il faut affronter le mauvais temps, écrire ainsi,en silence, pierre par pierre, dans le vacarme de la mer, la phrase de l'instant, unique, éphémère.
Il faut lire l'avenir dans les falaises condamnées à la chute fatale...Être le noyé aux yeux blancs, souffle perdu entre deux eaux. Il faut devenir paysage face à une assemblée qui décampe devant l'hiver, galope, oublie, se gave et vomit pour faire de la place et mieux se remplir.
Le tambour du monde bat la chamade dans ma poitrine. J'emboîte le pas à l'estime. J'ai aperçu la fin du voyage à une longueur de souffle, petit filet coulant à la commissure des lèvres, au bouche à bouche avec un vent mauvais.
Il est temps de reprendre la route et chercher un havre de paix. Il est l'heure d'allumer un feu de solitude, de préparer les bradons pour la marche de nuit.
Demain, je t'emmènerai, dans les premières neiges dans les sentes du Menez Hom. Demain, nous regarderons l'avenir de chez nous. Demain je t'offrirai le printemps, loin d'ici.


Roger Dautais


















Il y a des arbres
Il y a ce vent très frais
Il y a eu peut-être des ours ici
Il y a longtemps
Il y a le soir qui tombe
bientôt
Il y a tant d'oiseaux qu'on devine, qu'on ne voit pas
Il y a les yeux le désir de rester juste un peu
Tu veux
mais s'il fait noir
Il n'y a pas à dire
seulement à murmurer
et encore.


François David

Retrouvez ce poète dans l'Anthologie subjective de mon ami Guy Allix

guyalliax.art.officelive.com/françoisdavid.aspx

52 commentaires:

  1. Le solde de l'esprit, toujours ici, dans son magnifique espace. Comment j'aimeriez assister à ces moments-là... excellent!

    Bon week-end Roger
    cvb

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oceano AzulSonhos,
      Voici donc revenu ton commentaire, après un voyage underground sur Blogger. Mais cela ne fait rien, deux fois valent mieux qu'une.
      Belle soirée, Amitiés,

      Roger

      Supprimer
  2. Je suis toujours admirative de tes créations ,de jolies couleurs qui réchauffent le coeur .
    Et un très beau texte; j'aime cette phrase que je trouve très belle et tellement pleine d'amour :Demain je t'offrirai le printemps .Ici ou ailleurs quelle importance
    Bon Week-end

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Brigitte,
      Je pense tellement à cette phrase parce que, avec Marie-Claude, nous vivons dans l'urgence depuis notre rencontre en 1965.
      C'est sans doute cela qui lui donne un caractère de particulier.
      Belle fin de weekend ,

      Roger

      Supprimer
  3. absolutely amazing!!!

    love all of these!

    hope you're having a great weekend and thanks so much for the lovely comment!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Betty Manousos,
      Bienvenue sur Le Chemin des Grands Jardins et merci pour ton commentaire.
      J'espère te revoir souvent.

      Roger

      Supprimer
  4. Belles compositions, je les aime tous, en particulier ceux qui sont envahis par la mer, les grandes abstractions. Salutations.

    RépondreSupprimer
  5. Leovi,
    En bord de mer, tous mes travaux sont envahis par elle et donnent un vrai caractère éphémère à ces oeuvres.
    Merci de ton passage.

    Roger

    RépondreSupprimer
  6. Yes Roger !! / "Il faut lire l'avenir dans les falaises condamnées à la chute fatale... " /
    après toi peut être j'ai marché au pied des falaises des vaches noires
    dans les fossiles des terres écroulées on peut apercevoir des traces du passé
    frôlées pas les les vagues et les écumes ... profondeurs amnésiques...!
    Amitiés
    Patrick L.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Patrick Lucas,
      Le falaises renferment toujours de terribles souvenirs.
      Amicalement,

      Roger

      Supprimer
  7. je suis toujours touché par ton travail et autant par la force de tes ecrits.Bon dimanche

    RépondreSupprimer
  8. Une très belle page.... Demain je t'offrirai le printemps, loin d'ici....
    Bon dimanche !

    RépondreSupprimer
  9. "Demain je t'offrirai le printemps..."
    Une preuve d'amour comme vos oeuvres qui ne sont "que" ça, finalement.

    RépondreSupprimer
  10. Je trouve que tu écris aussi bien que tu crée ! Toujours un plaisir de visiter ton blog,

    RépondreSupprimer
  11. Jane,
    En ce qui me concerne, il n'y a pas de frontière entre mon écriture et le land art qui la prolonge ou la précède, c'est selon.
    Merci de ton commentaire
    à bientôt,

    Roger

    RépondreSupprimer
  12. C'est un plaisir de venir se ressourcer ici.

    RépondreSupprimer
  13. Bonne année, Roger ! j'arrive seulement maintenant, l'hiver est long et mordant ici, et ma vie me tient à tant de choses, m'agrippe et me contraint.
    J'aime ce billet, je te souhaite un printemps comme mille étés.
    D'ici là, tenons.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Anne des ocreries,
      Merci de tes vœux. Je pense être passé chez toi pour en faire de m^me mais je les renouvelle bien volontiers.
      En attendant que l'hiver passe, je t'embrasse bien amicalement, ça réchauffe.

      Roger

      Supprimer
  14. Amaryllis,
    Et pour moi, c'est un plaisir de te recevoir.
    à bientôt,

    Roger

    RépondreSupprimer
  15. je suis l'arbre et je t'embrasse avec mes longs bras mais attention, pas craquer d,allumette sinon je pourrais m'embraser...

    Très joulis jardins !

    RépondreSupprimer
  16. Hello Roger!
    Ton passage m'a fait un plaisir tout particulier!
    Je t'avais "perdu" après mes gros soucis de blog infecté par un malware, un lien ancien qui m'a polluée et j'ai perdu ainsi quelques contacts!
    Bravo pour toutes ces belles réalisations et cette imagination qui ne te quitte pas!
    tout y est, la matière, les teintes, les compositions et l'harmonie qui lie le tout!
    Vraiment très plaisant à admirer!
    Mes amitiés et bonne soirée!!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Noushka
      C'est vrai qu'il y a de plus en plus d'incidents techniques sur le Net et cela crée des ruptures parfois définitives dans nos contacts. Heureux de te retrouver ici, mais aussi sur ton blog. Ton dernier reportage photos sur le chevreuil, est remarquable et j'invite mes lecteurs à le découvrir.
      Merci pour ton commentaire.
      Bien amicalement, et à bientôt,

      Roger

      Supprimer
  17. La 1ère photo est celle qui me touche le plus je crois, peut-être parce que je vois des êtres, leur regard tourné vers un même horizon.

    Merci Roger (et pour la recette également!!!!)

    Belle soirée et douce semaine.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Le Journal de Chrys
      Ce que j'appelle " les guetteurs de marée", une fois installés, vivent leur vie jusqu'aux premières vagues qui les feront retourner à l'estran, dans leur position initiale. Je leur prête une vie éphémère, chargée d'histoires nouvelles à chaque fois. Leur regard tourné vers l'horizon symbolise un espoir commun en l'avenir.
      Merci pour ton commentaire et à bientôt sur ton blog.
      Belle journée à toi,

      Roger

      Supprimer
  18. Rainette,
    Bienvenue sur Le Chemin des Grands Jardins, il y a de la place pour les grenouilles sympa.
    Je t'embrasse aussi,

    Roger

    RépondreSupprimer
  19. Sur la lande le vent souffle bas et les ajoncs fleurissent aux quatre saisons
    St Michel, que la brume décoiffe, offre au soleil d'hiver son granit et ses ardoises
    On pourrait presque croire que "les rêves d'étés ne sont pas vains" ...

    Votre écrit est superbe
    Vos photos aussi
    Merci pour ce partage

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Danièle,
      Il n'est jamais vain de rêver à condition de pouvoir, au moins de temps en temps, réaliser quelques rêves. L'un des miens est de retourner dans les Monts d'Arrée dont la magie Celte enchanta ma vie,autrefois.

      Merci pour ton passage,
      Kenavo

      Roger

      Supprimer
  20. la nuit dévore le jour qui balaye la nuit
    tout s'arrête et recommence à l'infini et un
    jour pourtant les falaises s'écroulent...
    tes créations disparaissent emportées par l'eau et le vent
    quelle importance ! ils font partie des éléments...
    c'est le moment présent qui compte !
    les tiroirs des souvenirs
    se remplissent et on peut les ouvrir quand on veut !
    et toutes tes images en disent long.....
    merci Roger
    je t'embrasse

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Marty,
      ...et malgré tout, la vie l'emporte, laissant nos gestes à leur juste place, à peine une oscillation dans le grad univers.
      Je t'embrasse amicalement,

      Roger

      Supprimer
  21. Bonjour Roger, la tempête ouvre les voix de pierres, elle sait que tu entends la Parfaite Nature qui s'en vient sur ta voie; Amicalement: thibault

    RépondreSupprimer
  22. en attendant demain, l'hiver est superbe ici !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. L'hiver est superbe, oui, mais il mord quand même et me laisse peu de choix d'action, pour des raisons de santé.
      Belle soirée,

      Roger

      Supprimer
  23. Il n'y a pas que le printemps.
    Tu sais montrer de chaque saison la beauté.
    La première photo est particulièrement belle. J'y vois comme des marcheurs, des pèlerins au milieu des algues, des gardiens d'âmes peut être.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pastelle,
      Merci à toi qui fait surgir les chevaux de la glace. A chacun sa magie.
      Belle soirée, Pastelle et à bientôt,

      Roger

      Supprimer
  24. Ton texte est à la hauteur de tes images : émouvant, grandiose, humble, nostalgique.
    Il révèle beaucoup d'amour de la nature et d'autre chose. Il révèle que les sensations de l'hiver sont aussi un puits où l'on peut puiser des espoirs de printemps.
    Merci pour ce beau moment à te lire et regarder ce que tes yeux et tes mains ont vu et créé dans l'instant de l'éphémère mystère de la nature.
    PS : j'ai finalement publié un modeste texte sur le land-art sans art, c'est ici, je te mets en lien ...http://saravati.skynetblogs.be/archive/2012/02/07/land-art-sans-art.html
    Amicalement.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. saravati,
      Merci pour ton très beau commentaire.
      Je suis allé voir et lire ton billet sur le Land Art. Un peu provocateur mais bien envoyé.
      Belle soirée à toi et j'espère à bientôt,

      Amicalement,

      Roger

      Supprimer
  25. Le Petit Prince mettait sa rose sous un globe; toi, tu protèges la plante aquatique sous un tipi de branches: belle image , comme toutes les autres.
    Grosses bises d'Ep'

    PS: n'oublie pas de te couvrir: dehors, tu vas avoir si froid ^^

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Epamine,
      J'avais aimé voir le soleil venir à point éclairer cette jeune pousse, aux confins de l'hiver et ainsi annoncer un printemps précoce et froid.
      Merci de ton passage. Rassure toi, je me couvre chaudement avant de sortir..
      Je t'embrasse amicalement,

      Roger

      Supprimer
  26. Oooo Roger!!!!
    Do not stop to flaunt it!!
    It's amazing works of art!
    I saw them many times and read the wonderful words!
    Your blog is one Hymn to Nature!!
    I wish you a good weekend

    RépondreSupprimer
  27. Fabulous creations and photography, Roger. Love the "star leaf!" :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Nancy,
      Je viens de passer chez toi, dans ton ranch.
      Merci de ta visite,ici,

      Roger

      Supprimer
  28. De ce billet et l'avant dernier ce que je retiens c'Est ces quelques coup d’œil original... entre-autre, la coulée de pierre de la grotte et tes deux obélisques en pleine marée montante...

    bonne semaine

    RépondreSupprimer
  29. Carol Proulx,
    Merci pour ton commentaire. Un petit détail,les obélisques c'est plutôt de culture Égyptienne, les cairns( ce que tu vois sur mon blog) sont une tradition Celte.

    Roger

    RépondreSupprimer

Membres

Archives du blog

Qui êtes-vous ?

Ma photo
Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.