La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

samedi 19 mars 2011











Je ne pense pas que l'écriture nous donne une nouvelle identité. Nous n'en avons qu'une et c'est déjà très lourd. Par contre je vois bien cette écriture comme une arborescence dont nous serions incapables de voir les ramifications dans leur entier. Tutoyer le ciel vide comme un aveugle et sentir les nuages nous rafraîchir les idées me semblerait alors possible sans sombrer dans la folie, dans le déni du monde, dans la perte d'autre ou de soi.

Je me sens très artisan, très manuel, lorsque j'écris et cette dualité ne me gène pas. Je ne suis ni pour la dichotomie de l'âme ni pour la partition des mondes. Le magma me va.

Roger Dautais

Terrible, le vide alentour et pourtant, il faut vivre avec. Aux portes des églises, sur les pavés des rues froides, elles explosent le monde, ces femmes artistes. Nous ne faisons que passer dans leur ombre. C'est bien ainsi.

Visiter une exposition fusse-t-elle bouleversante, n'est pas sans danger. Après, on s'arrange avec les souvenirs. Il faut écrire vite. Le temps passe, les souvenirs aussi. La vie mange la vie. Les bribes de mémoire ne font jamais bon ménage avec les souvenirs effilochés. Que reste-t-il, une fois le temps de l'écriture passé ? Deux expositions à voir. Mais où, dans quelle ville ? Dans celle que tu voudras. N'oublie pas. J'ai refermé les portes de l'armoire à souvenirs. C'est le Printemps aujourd'hui, n'est-ce -pas, même pour mes morts, si lointains en terre Bretonne. Je vous aime.

Ici commence ton pays

Il ne suffit pas d’inviter les pleureuses, de déchirer le voile opalescent. Il ne suffit pas d’injurier les parjures et de repousser les grands prêtres dans le Saint des Saints.

Il ne suffit pas d’arracher la mauvaise herbe pour en faire d’exquises salades que des bouches fines goûteront avant l’extase.

Les tabernacles ont laissé s’échapper une envolée d’angelots pilleurs d’hosties. Les tombes sont ouvertes, il suffit d’y entrer, d’attendre le froid de la longue nuit et du délitement de l’âme.

Au cœur brisé, il faudra dire que cent poupées ne font pas le monde. Ton regard acéré de petit mâle n’arrive pas à la hauteur du nombril de ces femmes offertes.

La femme exulte, flotte, sombre.

L’homme croit qu’il est.

Ainsi naît le trouble.

Ainsi soit-il en ce lieu

Pour les mécréants

Comme pour les canards boiteux

Happés par la bouche noire

Urbaine et religieuse.

Ici, la beauté se mange

Des yeux.

Ici commence ton pays.

Roger Dautais Hiver 2011


Les évidentes

Viandes évidées, elles éructent en silence. Ça me parle. Les poupées entre elles, n’ont pas la clé des églises et la pluie ruisselle jusque dans ton cœur. Un regard jette un œil et le borgne regrette ce geste.

Ici nous irons, de chapelles et crimes, de prisons en sévices, pour exploiter le regard comme une carrière de granit, froid, distant, surgelé. Au château d’Ô les princesses au aux pieds nus, peignent des pensées insanes et les poissons rouges campent dans les cages à serein ;

Les pantins s’alanguissent, les bourgeois bavent sur le sarrau. Les yeux exorbités comme des pendus, ils perdent leur semence. La mandragore poussera au travers des pavés.

Les têtes roulaient à deux pas d’ici devant les foules sanguinaires et le bourreau ficelait, déjà les mains derrière le dos..

Il faudrait les tuer toutes, ici, pour obtenir un bain de sang, puis traire l’animal pour préparer le bain d’ânesse.

Apaisante transition des peaux laiteuses en fin d’hiver, sacrifiées pour le plaisir des yeux.

Quel enfant n’as-tu jamais pour proclamer ainsi le sacrifice et le crime, toi l’inconnue scandalisée de voir.

Ici, nous souffrons d’être.

Roger Dautais Hiver 2011

Je m’en vais


De la bouche grande ouverte sortent des maux. Ils sont femme-enfant, fille-torture, bandage-bondage, non-dits et les cloches des églises se sont tues.

Païenne aux yeux de mer, prêtresse de divines enlacées, tu exultes aux portes d’Airain. Vulcain t’embrasse à pleine bouche. Tu suffoques et rends l’âme sous la cendre du pilori.

Les vents d’ouest ont amené les papillons dans ta lumière. Gorgone, tu suces leur sang et tu lapes les gouttes sur le pavé. Louve, tu les séduis dans la mort et les allaite.

Les peaux s’irritent, rougissent, meurtries sous tes liens sadiques. Les histrions pérorent et montrent les étoiles jaunes épinglées sur le cœur. ;

Voici, par là, le ci-devant et e divan approchés, accouplés dans un orgasme sismique, symétrique et végétal. La tombe carrée te sert d’entrepôts. Ici l’on tue et dehors, d’accortes servantes nous servent du café noir aux terrasses voisines.

Ventre gris, ventre mou, la vie se prélasse et toi, ta jeunesse passe dans les courants d’air irradiés.

Mystique, tu regarde passer le jour, tu me regardes aussi, mi-ange, mi-démon.

L’heure sonne.

Je m’en vais.

Roger Dautais Hiver 2011


Ce triptyque a été écrit après avoir visité l'excellente exposition BROKEN DOLLS *de l'artiste Caennaise Annlys BONIN , installée en ce moment au cœur de la ville de Caen, dans l'église du Vieux saint Sauveur. A voir et revoir sans modération.

* http://www.anxiogene.com/

27 commentaires:

  1. Bonjour Roger,je t'entends comme Lu Xun qui disait je serais cri. Amitiés : thibault

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  2. J'aime ce que tu écris sur l'écriture, Roger.

    L'écriture, c'est nous, bien sûr, avec cet immense espace projectif qu'elle nous offre... C'est ce "magma" (j'aime bien ton terme) entre notre maîtrise et la trace de nos pulsions, et c'est en ce sens qu'elle a une part de vrai, puisqu'une part de non-contrôlé.
    L'écriture c'est donc notre miroir, un "fil de vie" qui respire et bouge au fur et à mesure des événements, c'est, je crois, une collaboration permanente entre le conscient et l'inconscient...

    Ce ne sont que mes modestes réactions "en vrac" en ce matin de printemps, prends ces phrases comme telles...
    Très belle journée à toi, je t'embrasse.
    Norma

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  3. je comprends Roger que cette exposition t'inspire,
    la féminité cabossée des poupées de Annliz BONIN est impressionnante ! As-tu rencontré l'artiste ??
    .....Le poids de tes mots.....!!!
    bisous Roger - je te souhaite un beau dimanche !

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  4. Comment écrire, autrement. l'écriture est une rencontre avec soi qui ne trouve son prolongement que dans l'autre.
    Il y a des adresses que nous perdrons avec d'infinies précautions et la douce intention de les retrouver un jour. Ma voie lactée dort sous une épaisse couche de cendres que le vent de Pologne ne cesse de soulever. Mais il ne faut plus en parler, ne pas en parler, ne plus l'écrire . Cela gène tant de monde.Une ésotérique rhétorique sert de placebo et les maux se terminent par des mots de tête. L'homme médecine court après son ombre t moi, de même. La poésie contemporaine ne s'écrit plus dans les académies. Elle saigne avec le peuple opprimé. Elle n'est pas que boudoir et petits zoizeaux.
    J'aime l'horizon basculé d'Annliz Bonin, dont il faut comprendre l'œuvre dans sa présence. Je n'ai pas grand chose à ajouter après ce choc. Vive la vie lorsqu'elle s'exprime ainsi, hors des conventions.
    Les septique qui passent leur temps à trier le vrai du faux, me lassent.
    Je t'embrasse,

    Roger

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  5. tHIGE?
    Seul, le Rhône connait tes secrets aussi bien que ta peinture et tes mots. Je t'embrasse fraternellement,

    Roger

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  6. Norma,
    Ton vrac me plait, Norma, il est sincère et possède beaucoup de charme, comme toi.
    Belle journée,
    Je t'embrasse,

    Roger

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  7. Belles sphères blanches, comme des bulles d'enfance en voyage.......

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  8. Je n' ai pas trouvé d' images sur cette artiste, j' imagine par tes mots qu' elle peint les forces tourmentées oscillant entre Eros et Thanatos,mystique et profanation, offrande et holocauste.
    C' est un hommage qui pourrait figurer parmi ses oeuvres apparemment, riche de la même rage et de la même force blessée.

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  9. "Je me sens très artisan, très manuel, lorsque j'écris et cette dualité ne me gêne pas": oui, Roger, ciseler l'écriture pour non pas dompter mais sublimer l'élan qui emporte en un joyau à offrir peut-être en réconfort des âmes blessées, peut-être en éveil des esprits qui s'endorment.
    Anne

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  10. Annlys BONIN peut s'enorgueillir d'avoir une publicité de grande qualité.
    Ce qui est visible sur le lien que tu donnes met en effet l'eau à la bouche.

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  11. je viens de voir le diaporama en lisant ton texte ( http://www.anxiogene.com/spip.php?article1) et je vois
    cette force qui surgit de la femme, le lien avec les mots que tu traces.
    ton écriture, si intuitive, nous donne le meilleur,
    J'aime beaucoup le premier volet
    je t'embrasse Roger

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  12. Autant tes poèmes sont beaux, profonds, parfois même douloureux, autant je trouve morbides les femmes-poupées d'Annliz Bonin.

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  13. C'est toujours un enchantement de venir ici, un enchantement qui s'accompagne d'un sentiment de grand respect !
    Merci de votre passage !

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  14. Bonjour, LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS.

    Thank you for your love and sincerity.
    I cannot take your words without my tears.

    We did not know the real nature of the object which we made.
    We have done irreparable thing.
    The monster of the uncontrollability. . .

    I am ashamed for world friends in our ignorance.
    I apologize to world friends as Japanese one.
    However, you do not need to forgive Japan which polluted the earth.
    Because this result is last arrival point of way which ourselves chose.

    The tsunami is the creation of the Nature.
    The monster is the creature of the Man.

    This tragedy is already too enough.
    The fire fighting workers who prepared for death...
    The citizens who avoid radioactivity, and wander...

    The monster is Absolutely unnecessary.
    Convenience. Luxury. Comfort. more, and more...
    Even if I was robbed of all of them, I am enough if there is the beautiful earth.
    I accept the misfortune with pleasure.

    The beauty of the Nature which you show.
    After our tragedy, I recognized them like the complete jewels.

    I deeply thank for your warm heart and thoughts...

    From Japan, ruma

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  15. Bonjour, Roger.
    Merci pour tout,
    Ton chemin qui se trouve et se perd
    ton coeur qui ne s'essouffle jamais
    Ton talent qui nous prend la main.
    Ton film que j'ai reçu avec tant de plaisir.
    Ta gentillesse pour tes mots joints.
    L'article de la revue qui parle de toi si bien.
    Oui, merci pour tout.
    En fraternité

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  16. oh mon étoile sur la feuille est juste magnifique! je vous remercie pour ça! votre créativité me ravit! câlins, Caterina

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  17. Choc et violence de la vie.
    Dans les mots, la peinture, la terre, le land art... perdre ses repères pour oser créer ! Merci pour cette urgence des mots !

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  18. Merci aux commentateurs, j' ai vu le lien,en effet les mots transcendent les images et leur projection les unes sur les autres recréent de l' art à quatre mains, on ne saurait mieux légender ces cartes de la femme.

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  19. Les mots comme porte drapeau , les maux comme des sanglots enfouis dans l'amer de l'océan .... Un tourbillon dévastant , enterrant laissant des errants , désespoir et désolation ....Je comprends tellement cette écriture comme des griffures sur le sol écartelé , malmené par la nature .... La terre devenant le tombeau de milliers d'âmes innocentes et pourtant ils ont de l'audace ces survivants de croire encore à la vie . Ils cheminent , dans leurs têtes des projets pour ne pas sombrer dans la folie ....Le nucléaire en plus de ce tsunami va grignoter leurs vies et malgré ça ils continuent ... Ne jamais oublier , les aider à retrouver la mémoire de la vie ... Les dorloter dans un sillage d'amour et de tendresse . Nul n'est à l'abri ....Merci Roger pour cette écriture qui est un cri ....
    J'ai vu l'exposition d'Annelys Bonin et comme toi je ne peux que la recommander ...:)
    Douce soirée auprès des tiens ...
    Bises ...

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  20. Ah bien sûr que non, l'écriture ne nous donne pas une nouvelle identité, elle révèle la nôtre... elle permet de puiser au fond de nos pensées pour mieux la dire, elle nous donne les mots pour en faire des révélateur de ce que nous sommes. L'écriture est une marche, une démarche vers plus de vérite. Comme tes réalisations de landart d'ailleurs Roger. J'aime quand tu joues l'aiguille sur le cadran de tes rêves !

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  21. Those are some really interesting photographs. I love the creativity behind them.

    Followed.

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  22. Gracias por ofrecernos unas imágenes y unas palabras tan llenas de contenido.
    Saludos y buena semana creadora.

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  23. Hello,
    I love your photos, very very different-unique. When I first visited your blog, I was dissppointed that I did not see a link to leave a comment. But happily I found it on my second visit! In one of your photos,where are some white balls, what are they?

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  24. ...hola...he pasado para ver tus últimos trabajos...un saludo...

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  25. Roger

    de belles images. votre magie et vos articles. ces ballons, ressemblent à des œufs de tortue ou tout autre animal de la mer ..

    m'étonne toujours, merci.

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.