La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

jeudi 24 mars 2011
















au docteur Claudine H.D.
la maman de Niak
en souvenir de notre pays commun, la Bretagne...







Et voilà les donneurs de leçon qui s'avancent drapés dans leur toge romaine, dignité en sautoir, breloque de gloire posthume annonçant ma fin.
Mon Dieu que j'aurais tort de me mettre à leurs pieds et couper le laurier pour ceindre leur front. Les caciques ont bavé sur leur belles chemises blanches et des jeunes filles insanes essaient vainement de leur redonner un brin de virilité perdue. La femme est supérieure, à l'homme elle qui n'a pas à soutenir ce qu'elle avance pour prouver sans cesse.
Y-t-il un âge pour être rayé de la carte ?Le bon sang bleu suffirait-il à justifier une présence sur terre, et le reste à enfourner dans les bouches noires du "détail".
Le bétail se convoie. Les trains sont prêts et qui parle de mémoire lorsque les vociférations ont été remplacées par le charme blond... Mais les chefs de gare sont prêts et les képis aux ordres.

- Monsieur, je ne vous permet pas, ôtez-vous de ma table, ici ne déjeunent en ma compagnie que des agrégés de lettres,
disait le professeur de terminale B, vêtu d'un costume trois pièces repoussant là un jeune prof qui arrivait pour déjeuner , plateau en main , le repoussant vers le box des factotum.
Dans les années 40, cette scène ? Non, il y a 14 ans seulement, dans un lycée Français. Et moi qui croyait que l'homme agrégé...
Plutôt désagrégé aussi, ce poète imbu, devenu imbuvable tant on lui avait gonflé la tête. Dame, comme on dit chez moi, en Bretagne, il avait fini par croire qu'il était le seul sur terre et bourré de talents. Bourré seulement, et tous les soirs à rouler sous son lit vide.

Nous ne sommes autorisés à rien, strictement à rien, ni à dire, ni à penser dans ce bahut, en 1997 où mon chef hiérarchique m'indiqua for généreusement :
Ici, mon gars, c'est pas la peine de penser, on pensera pour toi
.
Grandeur humaine. Avec une telle ouverture d'esprit, cet homme ne pouvait être qu'un génie et il l'était.
Je ne ressors pas mes vieilleries ni mes pleurnicheries liées à ma race, non, non, je dis simplement que de fachos, il y en a partout et qu'ils se cachent de moins en mois. Être artiste n'est pas une sinécure mais au moins, en ce qui me concerne, cela me structure et donne un sens à ma vie. Cela à fait de moi, un résistant.
Mais ne croyez pas que cela vous sauve d'une balle dans la tête, en principe, dans des régimes dictatoriaux, on passe à la casserole en premier. Ils n'aiment pas les gêneurs, les fauteurs de trouble. Que ce soit dans les pays de l'Est, d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique du Nord au Sud, cela est prouvé.
Découvrez la vie et le destin funeste du peintre Normand,André Daligault, ce curé génial qui fut aussi le maître à penser, le maître dans le domaine de l'art et de la peinture, pour Yvonne Guégan, elle aussi géniale et femme libre. Je crois que son sacrifice a laissé des traces au Mémorial pour la Paix de Caen. J'ai eu l'insigne honneur de travailler une semaine entière sur ses archives . Des œuvres arrachées à la mort, peintes sur des petits bouts de papier dans les différents camps de concentration où les Nazis l'internèrent jusqu'à sa mort par exécution. Ces petites œuvres clandestines furent sauvées de l'oubli par un kapo lui aida à sortir ces preuves de son existence pour ensuite pour les donner un jour à sa famille.
Quelle force, quelle résistance à la brutalité humaine instituée par le régime fasciste, dans les geôles allemandes, pendant qu'il était torturé, pour se garder en vie et, comme il l'a dit, échapper à la folie provoquée par l'enfermement, la torture, la douleur . Que lui reprochait-on à lui qui avait été dénoncé par de bons Français Pétainistes, on lui reprochait des faits de résistance, et aussi d'être un curé atypique, artiste peintre ! Tout pour plaire .Quelle leçon pour sortir de sa nuit, cette nuit, Nacht und Nebel, par la pratique d'un art pour ne pas sombrer dans la folie et crier jusqu'au bout sa haine du nazisme.

Les gommes à histoire sont ressorties et il convient pour nous, de nous ranger sur le bas-côté, de nous effacer sans cesse, jusqu'à la limite de la vie. Amnésie pour tous et profonde, noire. Votez, rangez-vous, taisez-vous, on s'occupe du reste.

Je continue le voyage seul., caméra au poing, vers cette contré qui vous est étrangère, ce pays, le miens, des terres noires caressées par le gel et le vent, cette contrée où la mousse accueillit mes premiers ébats, où le voisin du dessus de chez nous, lisait Mein Kampf, alors qu'enfant, je jouais sur le trottoir devant les bordels militaires d'après guerre, au bar de l'Étoile! C'était en 1947S.Comme quoi, une bonne guerre n'avait pas suffit pour faire comprendre quoi que ce soit à notre voisin, puisque cet homme était persuadé que seule, l'extrême droite pouvait sauver la France. C'est vrai, je n'invente rien. Ce lecteur avisé devint un des premiers chefs de camp pour Harkis, dans le midi.
La littérature forme quand même les esprits et donne à penser aux les imbéciles heureux. Dire que c'est une réussite, je n'irai pas jusque là. Mais je comprend bien aussi que tout le monde ne peux pas être artiste. La France deviendrait ingouvernable.
Il me faut marcher ma vie, l'inventer, la rêver comme me l'a appris le poète Youenn Gwernig, et rejoindre ces plaines balayées par les chants du vent d'Ouest et l'insouciante légèreté d'une vie délitée par l'âge. Il faut encore abandonner la dernière valise pour entrer nu en ce jardin des souvenirs perdus qui me redonnera l'envie de jouer la création.
Fasse que les Hespérides me tendent une pomme pour épancher ma soif, et qu'elle ne soit pas celle de la discorde. La marche vers mes origines n'est pas une reculade, ni une recherche de preuve à donner au premier petit con qui devient le comptable de mes gênes. Elle n'est pas non plus, un passage d'examen devant une poignée de savant cacochymes et morveux. Elle n'est pas la quête du Saint Graale, en loge. Elle n'est pas le rachat d'une jeunesse perdue ni celle d'un amour décadent. Elle est ma réalité, d'homme seul, entouré d'un monde que j'aime malgré lui et qui ne me le rend pas souvent. Les jeux du cirque sont revenus, les arènes sont ouvertes et les beaux candidats aux cravates rutilantes et aux implants dentaire impeccable nous vendent leurs idées. Dans cette kermesse, cette foire à tout, cette foire aux greniers, subsistent des lambeaux de démocratie et de justice, de liberté et d'égalité. Il en manque une, oui, la fraternité. C'est vrai. Les combats sont très fraternels, aujourd'hui et classieux.
Mais, les mots, voyez vous, pour bien les choisir, il faut au moins être agrégé et des agrégés il n'y en a pas 68 millions en France, alors, forcément, nous les ignares, nous nous trompons souvent.
Il faut aller voter...sans se tromper, Dimanche.

Roger Dautais







pour Marie-Claude

Mon amante a les vertus de l'eau : un sourire clair, des
gestes coulants, une voix pure et chantant goutte à goutte.

Et quand parfois,- malgré moi-du feu passe dans
mon regard, elle sait comment on l'attise en frémissant:
eau jetée sur les charbons ardents.


Victor Segalen
Stèles
Extrême-Orient 1929

20 commentaires:

  1. Roger, tu es le seul dont je lis les textes en entier, plusieurs fois même pour m'en imprégner
    et je dois t'avouer que j'en sors toujours un
    peu plus riche !!!! j'aime ta façon de dire les
    choses même si parfois mes origines en prennent
    un coup !!! je te souhaite une douce journée Roger
    bisous

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  2. Entièrement d'accord, il faut aller voter, ceux qui votent. Et pas pour n'importe qui, tant qu'à faire.

    Elle est bien mise à mal, notre fraternité, en ce moment.....

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  3. MARTY

    Tu sais, Marty,écrire, c'est y laisser des plumes mais, même nu et c'est vers cela que je tends, on doit rester debout.
    Je me suis posé la question de l'apparence en ces termes. Mes parents sont morts de cancer, et mon père avait probablement la maladie d'Alzheimer en plus. Dans cette maladie, on perd ses cheveux. Je me suis dit, si j'étais punk, ou rasta à la chevelure tressée et si, le hasard faisant pas toujours bien les choses, m'offrait un cancer, si je perdais tous mes poils, serais-je moins rasta, ou punk ? Aux yeux des gens oui. Aux miens, non.
    Si l'on s'attache à l'image corporelle, elle ternit bien vite et le mythe de la race supérieure sombre dans les arcanes de l'âge. Mais les pensées fascistes non font croire le contraire et attisent la peur de l'étranger.Ils nous veulent, moins bronzés, mois juifs, moins arabes, moins rasta, moins noirs, moins jaunes etc. Alors, par peur, par fatigue, par fatalisme, par obligation brutale, on plie et ces hommes de mauvaise parole prennent le dessus des peuples. Ce n'est pas une raison pour capituler.Les artistes ont un rôle à jouer dans cette partie.
    Il nous reste jusqu'au bout de la vie, jusqu'au dernier souffle , notre propre espérance ou désespérance, c'est selon, mais celle là, il faut la défendre au prix de notre vie. C'est ce que je voulais écrire ce matin après avoir vu un très beau film de Matthieu Chatelier:
    Voir ce que devient l'Ombre.
    Il parle justement de cet effacement volontaire d'un couple de très vieux artistes qui a compris que l'œuvre ne leur appartient pas,mais seulement leur vie. Et là, ils sont dans un choix philosophique d'une telle beauté, d'une telle humanité que je ne peux m'empêcher de faire une impossible comparaison.
    Celle du viol des consciences et des corps en camp nazi, du meurtre de la mémoire perpétué par les négationnistes, avec ce retrait choisi par ces deux grands artistes face à l'œuvre d'une vie . Il en ressort, à mes yeux, que l'œuvre majeure est dans l'esprit de l'homme, croyant ou non et qu'il est de son devoir de résister, de s'indigner aussi, dirait Stéphane Hessel même lorsque tout semble fini.. Félix Leclerc, revendiquait en son temps, le droit à l'erreur, mais je reste persuadé qu'il y a des erreurs à ne pas faire. La guerre en est une.La paix, jamais.
    Il est dur de naître, d^r de trouver une place, de la garder,dur de vieilli, dur de quitter la vie, mais si certains échappent à cela pour en faire un objet de domination et de politique, nous ne devons pas accepter de nous effacer, au moins sur ce plan là;
    je me suis permis de te répondre longuement, par estime réelle et par amitié.

    Je t'embrasse,

    Roger

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  4. Magnificas obras Roger siempre es muy agradable visitar su creativo blog!

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  5. Eh oui je suis normande d’origine et reviens assez souvent en ce moment pour partager du temps précieux avec maman.
    Oui les guerres ont laissé de nombreuses traces au sein de notre famille, de nos amis et du patrimoine.
    Votre documentaire sur votre rôle dans la thérapie grâce à l’art ne m’est pas inconnu bien que je ne l’ai pas encore vu. Vous appliquez également cet art par blog interposé : un site riche en éléments divers : textes, photos et toutes les suggestions qui peuvent en découler.
    Mes pas croiseront vos témoignages, qui deviennent pour un temps éléments de la nature, un jour prochain, j’en suis persuadée… Merci pour votre passage.

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  6. magnifique avec une grande preference pour les deux dernieres photos,bon w end

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  7. à côtoyer la mort trop souvent
    la frôler lorsqu'elle rôde
    à en devenir accro...
    s'arracher et continuer la route d'infortune
    le chemin .. devant ! comme une oeuvre éphémère

    Amantes vos mensonges
    sentent la menthe
    (R. Desnos ! mort en camp..)

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  8. Roger, j'avoue que n'étant pas dans un canton où l'on vote, j'ai suivi de loin mais je comprends tellement ton "coup de gueule"... et ça, ça va mieux en le disant n'est-ce pas ??

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  9. Roger, les pierres sont toujours dans le même lieu, tu leur donnes un nouveau chemin.
    Des saluts

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  10. Toujours cette richesse, cette rage et cette densité qui ne faiblit pas...La petite certifiée non agrégée que je suis serait inconditionnelle de ton écriture même si tu étais autodidacte , qu' importe le label rouge de la beauté? on ne risque pas une bactérie perdue!
    l' histoire émouvante de ce curé me rappelle le livre " l' enfant de Noé" d' EE schmitt, que je fais étudier à mes élèves,il est important de ne pas perdre la mémoire, tes combats le prouvent assez.
    Je ne votais plus depuis des lustres, mais j' ai voté dimanche pour une amie,je ne vois personne d' idéal, je m' enthousiasmerais pour un artiste s' il se présentait.
    Merci en tout cas de combattre à la plume,tes mots me parlent plus que d' autres, pourtant plus encensés.

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  11. "Il est beau ton tipi et ton petit, tapis dans ton tipi",... merci pour ton commentaire...et moi d'ajouter : "et tu n'as pas vu le petit tapir tapi sous le tapis du tipi!..haha
    un peut de légèreté ça fait du bien aussi. Bon week end.

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  12. Bonjour Roger,
    c'est toujours un grand moment de réflexion en parcourant land Art.
    Effectivement "nous les ignares nous trompons souvent"... mais nous sommes trompés encore bien plus souvent.
    Bon dimanche Roger

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  13. Tes obélisques en pierre sur le bord de la mer me fascinent toujours !

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  14. queste tue opere sono vera poesia!

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  15. Comme Chantait Claude Nougaro * le sang a la même couleur pour tous *.

    L' être humain est un animal, il défend son territoire quand il se sent envahi.
    les futures générations sauront-elles que ce sont les oeuvres d'un artiste élevant sa prière vers le ciel pour un monde meilleur ?! Peut-être l'interprétation sera, en accord avec les dolmens retrouvés, un site de prières universel.
    Vos installations, toujours fascinantes.

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  16. En mots, en images ou en actes, tu es toujours un maître, monsieur Roger.
    Merci pour les faire partager, une fois de plus,
    sébastien h.

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  17. Espero que aunque no podamos verlo, sigas caminando por esos jardines.. y fundiéndote con esa naturaleza que eres.
    Te echaré de menos.
    Gracias por enseñarnos la belleza.


    Chance!!
    Je t'embrasse!

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.